Son nouveau roman pour­rait être la suite de son prix Goncourt en 2018, Leurs enfants après eux. Ou comment deux quadras origi­naires des envi­rons de Nancy mais aux desti­nées profes­sion­nelles diffé­rentes vont retrou­ver souffle à travers une liai­son. Les scènes de sexe, conta­gieuses, sont aussi réalistes que la descrip­tion de la vie de tous les jours, pour laquelle Nico­las Mathieu n’a pas son pareil, notam­ment dans un magis­tral portrait de femme, Hélène, et “ces bouts de vie quoti­diens qui compo­saient le casse-tête de sa vie”. Derrière la recom­po­si­tion des régions au détri­ment des gens, ou le “maré­cage d’in­dif­fé­ren­ciés” des open spaces, l’au­teur d’Aux animaux la guerre, son superbe premier livre (bien­tôt adapté en série), traque le non-dit de ces vies trop lourdes, “ce truc qui la minait, qui tenait à la fois de la satiété et du manque, cette lézarde qu’elle se trim­ba­lait sans le savoir”. Virtuose, il alterne l’aujourd’­hui de “cet âge où le nombril est maître, la souf­france des autres pure­ment fictive”, avec des chapitres dans lesquels le passé de chacun de ses prota­go­nistes revient, “cette période englou­tie qui avait tant duré et qui semblait rétros­pec­ti­ve­ment si brève”.

Conne­mara, le roman social des quadras

Il décrit si bien ce qu’il se joue vrai­ment de ces vies silen­cieuses qu’on peut rester un peu inter­loqué de ce besoin un peu trop appa­rent de marqueur poli­tique à vouloir “gour­man­der la nation” et le “prêchi-précha des biens lotis” au point de vouloir termi­ner arti­fi­ciel­le­ment son livre sur l’élec­tion de 2017 (en confon­dant au passage RN et FN). D’où sans doute, un titre lui aussi en forme de marqueur assez balourd pour chan­ter un “lieu qui n’existe pas”. Ses person­nages auraient suffi, lui qui les écrit si bien, comme dans la séquence poignante de hockey “spina­lien” dans laquelle Chris­tophe, se sentant raccro­cher à force d’al­cool, fait tout pour jouer une dernière fois sous le regard de son fils. Un beau livre, un peu trop composé.

Nico­las Mathieu, Conne­mara (Actes Sud, 22 €).

Rencontre avec Nico­las Mathieu à la Fête du livre de Bron samedi 12 mars à 14h pour le dialogue d’au­teurs “Trou­ver son iden­tité” avec Silvia Aval­lone. Entrée libre salle des Parieurs de l’Hip­po­drome Bron-Parilly.

Hors les murs : vendredi 11 mars à 19h pour La Route des libraires à la librai­rie Les Danaïdes à Aix-les-Bains.

Lire aussi notre entre­tien avec Arnaud Viviant, autre invité de la fête du livre.