Michel Audiard n’était pas seule­ment le chantre de la langue fleu­rie et des formules mythiques « façon puzzle« . C’est aussi un obser­va­teur aiguisé des passions tristes, avec un sens du dialogue ouvrant sur les abîmes les plus noirs à l’in­té­rieur des person­nages, à la façon d’un Sime­non.

C’est ce qu’il réus­sit mieux que partout ailleurs dans le chef-d’oeuvre de Claude Miller, Garde à vue, de la moue faus­se­ment cynique et vrai­ment déses­pé­rée de Michel Serrault à la droi­ture outrée de Lino Ventura, en train de cuisi­ner un suspect pour pédo­phi­lie le temps d’une nuit au commis­sa­riat.

Le face-à-face inou­bliable entre Lino Ventura et Michel Serrault.

Garde à vue, un des premiers grands films sur la pédo­phi­lie

L’ar­ri­vée inopi­née de Romy Schnei­der pour une confi­dence dans la pénombre conduira aux pires mensonges dont sont capables les couples à la haine recuite. Un suspense plus noir que noir et le plus grand rôle de Serrault, encore plus boule­ver­sant lorsqu’on sait qu’il venait de perdre sa propre fille dans la vraie vie, alors qu’il est accusé d’en violer une dans le film…

Un sommet du cinéma français à tout point de vue, sur un thème que Claude Miller repren­dra d’un autre point de vue – celui de l’en­fant – dans La Classe de Neige, tiré d’Em­ma­nuel Carrère. Et qui sera un des tout premiers films français à évoquer la pédo­phi­lie, bien avant Grâce à Dieu de François Ozon.

Garde à vue de Claude Miller (1981, 1h24) avec Michel Serrault, Lino Ventura, Romy Schnei­der, Guy Marchand… Vendredi 17 novembre à 21h05 puis en replay sur France 5.