Scan­dale de Jay Roach, c’est un peu Grâce à Dieu de François Ozon à la sauce holly­woo­dienne : un film qui s’ins­pire d’un fait de société gravis­sime (la pédo­phi­lie dans l’Église contre le harcè­le­ment sexuel des femmes au travail), en s’em­pa­rant de l’écla­te­ment d’une affaire taboue, portée par des victimes qui osent enfin parler. Mais comme dans la version améri­caine d’un Happy Meal, tout est plus XXL : plus de stars (Char­lize Theron, Nicole Kidman, Margot Robbie), plus de brushings, plus de faits qui se déroulent plus rapi­de­ment et donc, à la clef, moins de nuance. A toute seigneure, tout honneur, c’est Nicole Kidman qui mène le mouve­ment de la révolte, et le résul­tat est aussi prenant à regar­der qu’ins­truc­tif : le réali­sa­teur, Jay Roach, a le mérite de reve­nir sur une des plus impor­tantes affaires de harcè­le­ment juste avant le phéno­mène #Metoo : en 2016, Roger Ailes, le fonda­teur de la pres­ti­gieuse chaîne d’in­for­ma­tion Fox News, alliée au camp répu­bli­cain, est donc accusé de harcè­le­ment par une ancienne présen­ta­trice vedette.

Char­lize Theron et John Light­gow dans Scan­dale.

Caméo Donald Trump

Suivant les grands prin­cipes jour­na­lis­tiques, le scéna­rio s’at­tache aux faits, et rien qu’aux faits, via trois présen­ta­trices très blondes et très ambi­tieuses, adop­tant parfois la ligne claire d’un docu-fiction, comme sait très bien le faire le diver­tis­se­ment à l’amé­ri­caine. Voir Donald Trump se faire inter­ro­ger sur la chaîne de Rupert Murdoch qui poussa à son élec­tion quelques mois plus tard ne manque pas non plus d’iro­nie rétros­pec­tive, main­te­nant que lui aussi a été « fired ».  Si le carac­tère des prota­go­nistes prin­ci­paux est un peu trop rapi­de­ment esquissé, le rythme intense nous empêche de décro­cher et le film prend même le soin d’évi­ter tout mani­chéisme en appor­tant un poil de subti­lité bien­ve­nue, en parti­cu­lier en ce qui concerne Megyn Kelly (Margot Robbie, boule­ver­sée) et Roger Ailes (John Light­gow, préda­teur pathé­tique et impé­rial). La pano­rama édifiant des coulisses des grands médias fait le reste, jusqu’aux plan larges pour mieux lais­ser voir les jambes des présen­ta­tri­ces… Un film docu­menté et hale­tant qui donne à voir l’hy­po­cri­sie sociale et le malaise du harcè­le­ment dans un ballet d’ac­teurs de haut vol.

Scan­dale de Jay Roach (Boom­shell, 1h44) avec Nicole Kidman, Char­lize Theron, Margot Robbie, John Light­gow… Dispo­nible en Vod et sur Canal +.