Revoilà un Pedro Almo­do­var plutôt en bonne forme malgré une excen­tri­cité plus conte­nue, avec ses couleurs franches, ses desti­nées de femmes fortes et bien-sûr son actrice fétiche, Pené­lope Cruz. Après Douleur et Gloire, son dernier film en forme d’au­to­bio­gra­phie mascu­line, le réali­sa­teur espa­gnol revient à ses premières amours en auscul­tant une nouvelle fois la mater­nité dans Madres Para­le­las. Un film dont l’idée avait germé plus de 20 ans aupa­ra­vant, tourné pendant le confi­ne­ment, et dont on croise même le titre dans Etreintes brisées via une affiche. Racon­tant la rela­tion ambigüe entre deux mères céli­ba­taires dont les bébés ont été échan­gés à la nais­sance, Almo­do­var s’aven­ture de nouveau sur des versants psycho­lo­giques incon­for­tables en évoquant des sujets tabou autour des liens du sang.

Pene­lope Cruz, mère et lesbienne

On aime toujours autant la façon du cinéaste de racon­ter ses histoires entre mélo­drame et thril­ler, parve­nant à ména­ger du suspense rien qu’a­vec une souris d’or­di­na­teur.  Mais le film est surtout l’oc­ca­sion de dres­ser un énième portrait croisé de femmes et de mères que tout oppose entre une Pené­lope Cruz libre et radieuse de deve­nir mère, et une ado trau­ma­ti­sée par son passé qui redoute sa mater­nité à venir. Peu à peu, chacune va échan­ger sa place avec l’autre, passant de l’ombre à la lumière. Non sans faire un sort aux tabous de la mater­nité, jusqu’à une scène d’amour à la sensua­lité renver­sante sur fond de Janis Joplin.

Milena Smit et Pene­lope Cruz, bouler­ver­santes.

Madres para­le­las et le passé qui ne passe pas

Convoquant constam­ment la vie et la mort, Almo­do­var en profite pour évoquer pour la première fois aussi clai­re­ment le passé franquiste de l’Es­pagne à travers le char­nier de son village que Janis veut rouvrir. Un récit secon­daire qui trans­porte ce film de conver­sa­tion en chambre, tourné pendant le confi­ne­ment, vers une réflexion histo­rique profonde sur la filia­tion et les origines, dans un finale inédit du cinéaste espa­gnol, offrant in fine un des plus beaux plans du film. Un faux petit film de la part d’un grand cinéaste donc.

Madres Para­le­las de Pedro Almodó­var (2021, Esp, 2h), avec Pené­lope Cruz, Milena Smit, Israel Elejalde, Aitanz Sanchez-Gijon, Rossy De Palma… Mercredi 10 avril à 20h55 puis en replay gratuit sur Arte.

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