
Quand le cinéma espagnol s’empare des problèmes sociaux en entreprise, c’est pour signer une comédie plus drôle que l’intégralité de la filmographie de Vincent Lindon ! El Buen Patron a raflé tous les Goyas en Espagne, dont celui du meilleur acteur. Et on comprend pourquoi. « Vehicle » comme disent les Anglo-saxons pour construire entièrement un film autour d’un acteur, Javier Bardem y est magistral de bout en bout, parce qu’il est… fourbe !

Il incarne ce « bon patron » paternaliste qui prend ses employés pour ses « enfants » (quand ça l’arrange) avec une vraie-fausse bienveillance mielleuse, retournant les arguments de leur révolte (en France on appellerait ça le « mensonge macronien » !), leur tournant le dos aussi vite qu’il leur aura souri pour les amadouer. Vieilli et bedonnant, Bardem, jubilatoire sans jamais forcer le trait, garde son panache au service d’un personnage plus complexe quand dans la plupart des pensums sociaux de l’Hexagone.
La bonne surprise de l’été


Mais le film ne se limite pas à son interprète principal, il sait réserver son lot de surprises d’une situation à l’autre dans un scénario habile qui n’épargne aucun des égoïsmes en place. Décliné en neuf jours à la façon d’un journal, il sait faire grincer la comédie en regardant la violence des rapports humains induite s’immiscer, du prologue de la petite délinquance à l’occupation jusque-boutiste devant cette usine de « balances ». Avec pour morceau de choix le sexisme envers une stagiaire (la bien nommée Almudena Amor) qui a parfaitement compris les règles du paternalisme d’antan au point de les retourner. Moraliste sans être moralisateur, soigné dans sa réalisation et acide dans le regard amusé qu’il pose sur notre époque, El Buen Patron est la première bonne surprise de l’été.
El Buen Patron de Fernando Léon de Aranoa (Esp, 2h) avec Javier Bardem, Manolo Solo, Almudena Amor, Sonia Almarcha, Oscar de La Fuente… Sortie le 22 juin.
