N’est pas Agatha Chris­tie qui veut : inspiré par La Sour­cière, Coup de théâtre de Tom George nous ennuie à force de multi­plier les réfé­rences ou faire naître le moindre suspense. So sad…

Il y a des films dont l’his­toire est plus inté­res­sante que le film lui-même. C’est le cas de ce Coup de théâtre (« Regarde les fuir » en anglais), premier film d’un réali­sa­teur de séries pour la BBC en panne d’ins­pi­ra­tion lors des derniers confi­ne­ments. Deux produc­teurs pares­seux (et oppor­tu­nistes) se demandent alors quelle pièce d’Agatha Chris­tie encore adap­ter au cinéma dans la foulée de Kenneth Bran­nagh. La Souri­cière bien sûr ! Qui n’a jamais quitté l’af­fiche des théâtres londo­niens depuis… 1952 ! Problème : le contrat d’adap­ta­tion l’in­ter­dit, Agatha Chris­tie ayant prix grand soin à l’époque de ne pas vendre les droits de sa pièce pour le grand écran moins de six mois après la fin des repré­sen­ta­tions (comme c’est d’ailleurs rappelé dans le film). Re-problème : les repré­sen­ta­tions ne se sont jamais arrê­tées ! En lieu et place, on demande donc à un scéna­riste lambda de faire du pseudo Agatha Chris­tie à la place d’Aga­tha Chris­tie… Il y aura donc un meurtre, mais à l’in­té­rieur d’une troupe en train de jouer… La Souri­cière.

Harris Dickin­son (à droite), l’ac­teur prin­ci­pal du prochain film de Ruben Ostlund, Sans filtre, Palme d’Or 2022.

N’est pas Agatha Chris­tie qui veut…

Qui a tué ? On s’en fiche un peu, tant cette nouvelle intrigue est labo­rieuse, et passe le clair de son temps à multi­plier les réfé­rences et les clins d’oeil pour nous montrer à quel point les auteurs connaissent leur Agatha sur le bout des doigts. Re-re-re-problème : les cinq minutes de La Souri­cière qu’on voit sur la scène du théâtre valent beau­coup mieux que l’in­té­gra­lité du film. Soigné, multi­pliant les splits­creens, Tom George réus­sit un joli travail de tech­ni­cien pour son premier long métrage. Mais il oublie juste l’es­sen­tiel : qu’on soit pris par l’in­trigue ! En prota­go­nistes enquê­teurs, Sam Rock­well et Saoirse Ronan font le job mais leurs person­nages sont fran­che­ment falots et répé­ti­tifs (lui toujours bourré, elle toujours seule à côté de la plaque), tout comme les allu­sions éculées à la reine Chris­tie (« ne tirons pas des conclu­sions hâtives« ). L’ap­pa­ri­tion de la vraie-fausse Agatha en fin de film finit par nous arra­cher un sourire dans ce diver­tis­se­ment jamais diver­tis­sant, à peine valable pour passer le temps d’une après-midi de Covid asymp­to­ma­tique. Mieux vaut attendre d’y jeter un oeil sur votre canapé velours avec une cup of tea, et retrou­ver le beau Harris Dickin­son – sous-employé ici – en person­nage prin­ci­pal de Sans filtre de Ruben Ostlund, la Palme d’Or qui sort le 28 septembre. Et qu’on vous recom­mande chau­de­ment.

Coup de théâtre de Tom George (See how they run, GB, 1h38) avec Saoirse Ronan, Sam Rock­well, Adrian Brody (qui meurt tout de suite), Harris Dickin­son… Sorti le 14 septembre.