Ouvrière dans une usine de fabri­ca­tion de mate­las et maman de deux enfants, Annie (Laure Calamy) retombe enceinte par acci­dent. Appre­nant l’exis­tence d’un comité local du Mouve­ment pour la liberté de l’avor­te­ment et de la contra­cep­tion (MLAC) pas loin de chez elle, elle décide de s’y rendre pour se faire avor­ter illé­ga­le­ment. Dans une première réunion clan­des­tine à l’ar­rière d’une librai­rie, les quelques femmes présentes (Zita Hanrot, Rose­mary Stand­ley) partagent leurs souve­nirs doulou­reux et leurs ques­tion­ne­ments honteux à propos de l’in­ter­ven­tion. La simple évoca­tion d’un cure­tage à vif ou de l’uti­li­sa­tion d’ai­guilles à trico­ter permet alors au spec­ta­teur de prendre conscience de la violence physique, psycho­lo­gique, mais aussi du risque sani­taire que vivent les femmes au quoti­dien. Durant son avor­te­ment, Annie décou­vrira la tendresse de l’opé­ra­tion et l’en­traide de ces femmes venues de tous les hori­zons avec pour seul point commun cet événe­ment si intime.

Réunion de femmes du MLAC dans les années 70 dans Annie Colère.
Réunion du MLAC autour d’un plat de pâtes

Si les scènes d’avor­te­ments sont un peu répé­ti­tives, elles restent instruc­tives sur le contexte social et les procé­dés utili­sées à l’époque comme la méthode par aspi­ra­tion, dite « Karman  », à l’ai­de… d’une pompe à vélo. Mais, contrai­re­ment à ce que l’on pour­rait imagi­ner, toujours dans des condi­tions sani­taires irré­pro­chables et sans compli­ca­tions… Afin de nous faire ressen­tir le drame vécu par ces femmes isolées, la réali­sa­trice se concentre sur leurs visages pendant l’opé­ra­tion, filmant leur surprise face à la tendresse de la procé­dure et surtout le soula­ge­ment d’être enfin consi­dé­rées et écou­tées, thème prin­ci­pal du film.

Pres­ta­tion étin­ce­lante de Laure Calamy

Entre L’Évé­ne­ment d’Au­drey Diwan, Call Jane de Phyl­lis Nagy (sorti direct sur Canal), le biopic sur Simone Veil ou la récente propo­si­tion de loi visant à inscrire le droit à l’IVG dans la Cons­ti­tu­tion, l’avor­te­ment est plus que jamais un sujet d’ac­tua­lité. Mais Annie Colère est plus qu’un simple film sur l’avor­te­ment, c’est aussi l’his­toire d’une révé­la­tion, et d’une renais­sance, malgré son titre. D’abord simple patiente, sa rencontre avec le MLAC va amener Annie à se ques­tion­ner sur son propre corps avant de fina­le­ment deve­nir une fervente parti­ci­pante du mouve­ment en aidant les femmes en détresse. La pres­ta­tion étin­ce­lante de Laure Calamy apporte à la fois beau­coup de pudeur et d’éner­gie. Mais c’est surtout la comba­ti­vité, la tendresse et l’har­mo­nie de cette soro­rité d’ac­trices qui porte le film.

Annie Colère de Blan­dine Lenoir (1h59) avec Laure Calamy, Zita Hanrot, India Hair, Rose­mary Stand­ley. Sortie le 30 novembre.

Laure Calamy aide à genoux une jeune fille qui a peur d'avorter dans Annie Colère.
Annie aide une jeune fille qui a peur d’avor­ter