L’en­fer du cinéma français d’au­teur est souvent pavé de bonnes inten­tions. De Grandes espé­rances n’en manque pas. A travers l’as­cen­sion program­mée d’une jeune femme brillante qui veut entrer en poli­tique pour acter « la fin du cycle capi­ta­liste« , Sylvain Desclous a l’es­pé­rance d’em­bras­ser plusieurs sujets à la fois : l’as­cen­sion sociale d’un milieu popu­laire, la problé­ma­tique du travail et des rachats d’en­tre­prise, une histoire d’amour (quand même), et les rouages poli­tiques qui empêche « la gauche de reve­nir au pouvoir » (sic, c’est Emma­nuelle Bercot en ancienne ministre qui s’y colle).

Serions-nous dans un film d’au­teur français ? Vous l’avez deviné, et puisque Sylvain Desclous ne cesse de faire jargon­ner ses dialogues autour de « l’éco­no­mie sociale et soli­daire » (sans jamais la filmer), il aurait dû commen­cer lui-même, au moins par souci de sobriété, par faire le tri dans son scéna­rio…

Rebecca Marder et Benja­min Lavernhe au temps de l’amour…

Rebecca Marder et Benja­min Lavernhe empê­trés dans un scéna­rio mal ficelé

Car en plus de ses méandres écono­mico-poli­tiques assez obscures, De Grandes espé­rances est, au départ, avant tout un thril­ler. Celui d’une jeune femme qui va tenter d’étouf­fer son meurtre d’un Corse un peu trop porté sur la cara­bine, après une simple alter­ca­tion routière avec son compa­gnon sur les sentiers des vacan­ces… On vous passe les détails d’un point de départ jamais crédible, Sylvain Desclous n’as­su­mant jamais de filmer son person­nage fémi­nin pour ce qu’il est : une véri­table garce (on ne révé­lera pas la fin), que Rebecca Marder fait exis­ter comme elle peut, faute de point de vue assumé de la part du cinéaste.

Diffi­cile d’être tout le temps gentil avec une garce, et ce qui aurait pu être un thril­ler véné­neux à la façon d’Un homme idéal de Yann Gozlan, version femme, se limite à des conver­sa­tions jargon­neuses de dîners de famille en cabi­nets. Même Benja­min Lavernhe voit son person­nage d’an­cien dépres­sif amou­reux bâclé au fil du film, cantonné à la veule­rie la plus totale. Diffi­cile de s’in­té­res­ser à un tel couple jusqu’a bout… Un faux pas donc, mais qui ne devrait pas barrer la route de deux comé­diens précieux du cinéma français.

De Grandes Espé­rances de Sylvain Desclous (Fr, 1h45) avec Rebecca Marder, Banja­min Lavernhe, Emma­nuelle Bercot, Marc Barbé… Sortie le 22 mars.

Rebecca Marder à la prison de Corbas (un indice, chez vous…)