Un prologue au Mali assez confus nous présente Ali, un ado sans qualité né en France, renvoyé au Mali par une mère céli­ba­taire assez insup­por­table – qui n’hé­site pas à le battre à la cein­ture – et qui sera la mère de tous ses maux, les hommes de la famille restant absents ou inexis­tants (miso­gy­nie quand tu nous tiens).

De retour à Mont­fer­meil (là où le co-scéna­riste Ladj Li a situé tous ses films et où Kim Chapi­ron a grandi), Ali est bien décidé à ne pas se conten­ter du petit boulot qu’il trouve à la mairie. Ses diplômes d’is­la­mo­lo­gie et de théo­lo­gie du Mali en poche (jamais inter­ro­gés par le film), le voilà qui se découvre un pouvoir psycho­lo­gique et langa­gier sur ses semblables, en parlant plus clair à la nouvelle géné­ra­tion que les anciens imams restés enfer­més dans leurs dogmes…

Abdulah Sissoko terrasse cantine au milieu de ses frères Le Jeune Imam.
Abdu­las Sissoko, imam et quidam à Mont­fer­meil…

Vie quoti­dienne et arnaque des Musul­mans de France

C’est à la fois la bonne idée – très ambi­guë – du film, et toute sa limite : montrer la vie quoti­dienne des familles de musul­mans de France et parti­cu­liè­re­ment celle de la jeune géné­ra­tion, à l’ombre d’un person­nage charis­ma­tique (formi­dable Abdu­lah Sissoko, déjà passé par l’Athena de Romain Gavras sur Netflix de la même bande que Ladj Li), mais dont igno­rera tout des réelles moti­va­tions jusqu’au bout (avec récon­ci­lia­tion mater­nelle lacry­male et arti­fi­cielle).

« Seule la critique sauve de l’ido­lâ­trie« … Cet imam pas comme les autres (loin­tai­ne­ment inspiré de plusieurs faits divers d’ar­naque au busi­ness reli­gieux que le film se garde bien de citer) prétend à un « islam apaisé » et ira même jusqu’à conseiller à son ami Mustafa de se marier avec la suédoise dont il est amou­reux, quitte à provoquer l’ire de ses parents, avant de parti­ci­per à une confé­rence sur la place des femme dans l’is­lam, en conseillant de favo­ri­ser « le travail d’abord », quand il s’agit d’y aller voilée… Avec le même visage impas­sible, il se livre à un cours de mani­pu­la­tion des Musul­mans en période de Rama­dan par les réseaux sociaux assez glaçante. Qui est-il vrai­ment ? On ne le saura jamais…

Le vrai-faux imam Ali Diallo au départ pour la Mecque.

Confu­sion idéo­lo­gique et esthé­tique publi­ci­taire

La critique du conser­va­tisme reli­gieux, et de la crédu­lité des fidèles qui n’hé­sitent pas à aligner les chèques dans un trafic de visas avec les pays de l’Est pour pouvoir aller prier à la Mecque, est assez inédite dans le cinéma français. Malheu­reu­se­ment, elle ne dure qu’un temps dans ce film par ailleurs assez commu­nau­ta­riste (les blancs n’y ont qu’un rôle de faire-valoir), aussi hypo­crite avec les moti­va­tions obscures de son person­nage que confus dans son propos. Une sorte d’Abdel­la­tif Kéchiche à l’es­thé­tique publi­ci­taire, sans doute animé de bonnes inten­tions, mais reflé­tant in fine la plus grande confu­sion des esprits pas très sains…

Le Jeune Imam de Kim Chapi­ron (Fr, 1h38) avec Abdu­lah Sissoko, Hady Berthe, Moussa Cissé… Sortie le 26 avril.

Hady Berthe, la mère de tous les maux…