Il y a un sujet passion­nant au coeur de la Jeanne du Barry de Maïwenn comme au coeur des tous ses films : la remise en cause des conve­nances par l’exer­cice du libre arbitre, et donc de la séduc­tion et de la liberté d’ai­mer. Elle la laisse ici de côté (pas de scène de sexe), au profit d’une obser­va­tion de la Cour pour les nuls : en surjouant la femme d’ex­trac­tion popu­laire, la première heure consiste à une expli­ca­tion assez pous­sive des conve­nances qui échappent à cette ravie de la crèche, avec rica­ne­ments poudrés gimmicks assez faciles repris tout au long du film comme le recul en petits pas pour ne pas tour­ner le dos au Roi …

Benja­min Lavernhe chucho­tant à la Du Barry.

Benja­min Lavernhe, plus éloquent que tout le scéna­rio

La ques­tion du trans­fuge social – qui verra la Du Barry guillo­ti­née en dépit de ses origines – comme il est dit à la fin du film, inté­res­sait autre­ment la démarche de la cinéaste dans ses films précé­dents, du Bal des actrices à ADN. Ici, comme médu­sée par le déco­rum, elle semble vouloir d’abord rester dans les bras de son Johnny Depp, se concen­trant quasi-exclu­si­ve­ment sur l’anec­dote d’une rela­tion enkys­tée par la monar­chie. Bavard, ajou­tant une voix-off didac­tique aux dialogues déjà très expli­ca­tifs, à l’image, le film passe son temps à orches­trer les mamours du Roi et de sa maîtresse jalou­sées par les autres, ajou­tant, pour faire bonne figure d’aujourd’­hui, une dose de fémi­nisme par-ci, et une dose d’anti-racisme par là… Mais de véri­table pein­ture sociale, il n’y a point.

Seul le person­nage de Maïwenn a le droit d’ex­pri­mer sa vérité et ses senti­ments, relé­guant Johnny Depp, pas déran­geant, au stade d’icône sans véri­table incar­na­tion, et les autres seconds rôles à la parade poudrée. Tous, sauf un : Benja­min Lavernhe en person­nage témoin, inten­dant du Roi dont un seul regard entre gêne et solli­ci­tude pour cette femme intruse en dit plus que l’en­semble de ce scéna­rio étirant à l’in­fini la possi­bi­lité d’une idylle.

Jeanne du Barry de et avec Maïwenn (Fr, 1h56) avec Johnny Depp, Benja­­min Lavernhe, Pierre Richard, Melvil Poupaud, Noémie Lvovs­ky… Sortie le 17 mai.