Une expo de BD au CHRD retrace le destin hors normes de Made­leine Riffaud, amie de Paul Eluard ou Raymond Aubrac, Résis­tante ayant tué un offi­cier de la Gestapo avant de deve­nir repor­ter de guerre.

Elle avait promis à son ami Raymond Aubrac de vivre jusqu’à 97 ans. La voilà toujours en vie à 98, source inta­ris­sable et co-scéna­riste d’un travail de BD autour de sa propre vie, bien plus rocam­bo­lesque que n’im­porte quel film de cinéma. Si la nouvelle « mini-expo » tempo­raire  du CHRD consa­crée à Made­leine Riffaud est plutôt modeste dans sa forme – une seule pièce, des panneaux de cita­tions et d’images d’ar­chives, des planches de dessins et des objets de sa collec­tion privée – l’his­toire qu’elle raconte donne une furieuse envie de se plon­ger dans le destin hors-du-commun de ce petit bout de femme au courage inouï.

Entrée dans un réseau de résis­tants étudiants alors qu’elle est encore mineure, elle se retrouve tortu­rée dans les geôles de la Gestapo à 20 ans, en 1944, après avoir abattu un offi­cier alle­mand. Condam­née à mort puis sauvée in extre­mis, elle devien­dra une figure emblé­ma­tique de l’in­sur­rec­tion contre l’oc­cu­pa­tion nazie. « Ils me band’­ront les yeux, avec un mouchoir bleu, ils me feront mourir sans me faire souf­frir », écri­vait-elle en chan­son dans sa cellule, fasci­née à l’idée d’être fusillée en révo­lu­tion­naire comme ses cama­rades de l’Af­fiche Rouge.

La salle de l’ex­po­si­tion Made­leine Riffaud, Résis­tante au Centre d’His­toire de la Résis­tance et de la Dépor­ta­tion de Lyon.

Made­leine Riffaud, Résis­tante et repor­ter de guerre

Plus tard, après la guerre, ses poèmes plai­ront tant à Paul Éluard qu’il la recom­man­dera à Aragon, fonda­teur du jour­nal Ce Soir. Visage rond à l’air effronté orné d’une longue et épaisse tresse noire, elle raconte dans une inter­view ses débuts dans le jour­na­lisme, d’en­voyée spéciale auprès des combat­tants viet­na­miens puis au coeur de la guerre d’Al­gé­rie ou immer­gée inco­gnito dans un hôpi­tal. « Lorsqu’elle fait le récit de sa vie, c’est souvent très long car elle se rappelle de tout, donnant même des détails sur la famille de ses compa­gnons d’in­for­tune. Sa mémoire est un véri­table ordi­na­teur », sourit Eloïse de la Maison, commis­saire de l’ex­po­si­tion. À travers son trait aux superbes nuances de bleu, le dessi­na­teur Domi­nique Bertail croque cette exis­tence d’ex­cep­tion, scéna­ri­sée par Jean-David Morvan. Bonne nouvelle, le premier tome est déjà sorti et deux autres arrivent.

Made­leine Riffaud, Résis­tante, expo­si­tion de bande dessi­née. Du mercredi au dimanche de 10h à 18h jusqu’au 4 juin au CHRD, Lyon 7e. Visites commen­tées les 11 et 15 février et les 5 et 18 mars. 6€.