Ce nouveau restau­rant, lape­reau de quelques semaines, succède au Tire-bouchon, vieux bouchon du Vieux-Lyon. Armada n’a rien à voir avec la flotte de Philippe II d’Es­pagne. Ça sonne bien voilà tout. La cuisine, contem­po­raine et décon­trac­tée, résonne bien aussi. La preuve, il y a du poulpe, signe des temps. Si vous avez huit bras, fuyez. Une armada de restau­ra­teurs pensent à vous jour et nuit. Cepen­dant, par manque de place au niveau de notre conte­nant, on n’a pas goûté cette version avec poivron, chimi­churri (sauce argen­tine à base de piments et d’herbes) et de xipis­ter (sauce basque à base de piment). Sur le compte Insta­gram du restau­rant, on avait été intri­gué par la photo d’ un arti­chaut surprise multi­liké. Donc l’ar­ti­chaut, servi soli­taire dans l’as­siette tel Victor Hugo en exil sur les falaises de Guer­ne­sey, a l’air tout à fait normal. Mais vu du dessus, on voit qu’il a été extrudé. Les deux chefs, Thibault Martel et Baptiste Rivière, lui ont arra­ché le coeur comme dans Abra­ham Lincoln chas­seur de vampires. A la place, l’es­prit tortion­naire ayant des limites, il n’ont pas versé du plomb fondu, mais une sauce choron. « Le chauve de Hara Kiri ?! » s’ex­cla­me­ront baby boomers et géné­ra­tions X. Abso­lu­ment pas, cette sauce, inven­tée par séren­di­pité et un certain Choron à la fin du XIXe siècle est une béar­naise à laquelle on a ajouté du concassé de tomate.

Deux chefs d’an­ciens étoi­lés pour révi­ser l’ar­ti­chaut et le chou-fleur

L’idéal est de parta­ger le plat à deux. On tire les feuilles comme dans un strip tease pour les trem­per dans le cratère. L’ar­ti­chaut s’en­tend idéa­le­ment avec l’es­tra­gon et les graines de sarra­zin saupou­drées. On aime bien cette façon de revoir les produits, comme les choux-fleurs au four servis entiers qu’on trouve dans certains restau­rants. Baptiste a passé quelques années en Colom­bie (les deux chefs qui se sont rencon­tré chez Tête­doie ont bour­lin­gué chez les étoi­lés). De fait, la cuisine est sous influence, comme l’huître en amuse-bouche baignée par un leche del tigre, la mari­nade habi­tuel­le­ment dévo­lue aux ceviches. Ou bien l’arepa de maïs (galette véné­zue­lienne), pulled pork (porc confit effi­lo­ché), japa­le­nos (piments mexi­cains), tucupi (jus de manioc fermenté). Qu’on se rassure la cuisine s’ap­pré­cie sans traduc­tion, comme l’ex­cellent foie de veau et spara­sis (ce n’est pas une mala­die véné­rienne mais la morille des pins) ou la truite saumon­née au lait d’algues. Les cuis­sons sont essen­tiel­le­ment réali­sées au barbe­cue se qui permet de déve­lop­per d’agréables notes fumées sur plusieurs plats. A accor­der avec une grosse carte des vins.

Armada. 16 rue du Boeuf, Lyon 5e. 09 83 22 88 47. Fermé dimanche soir. Carte unique­ment : comp­ter entre 30 et 45 euros (en gros la même carte midi et soir, mais elle évolue en continu, en fonc­tion des arri­vages). Vin au verre à partir de 6 euros. Bouteilles à partir de 33 euros. Eau micro­fil­trée (plate ou gazeuse) : 3 euros. Photo : William Pham.