« Je respecte beau­coup le réel, mais je n’y ai jamais cru  ». Pour sa première créa­tion au TNP, le direc­teur Jean Bello­rini adapte le grand auteur lyon­nais, Valèra Nova­rina, avec un texte inédit, Le Jeu des ombres, faisant la nique comme à son habi­tude à toute forme de narra­tion réaliste. Le spec­tacle devait faire l’ou­ver­ture du festi­val d’Avi­gnon dans la Cour d’Hon­neur. Que nenni, vous pour­rez le voir en janvier prochain sur la scène villeur­ban­naise, et en avant-première samedi sur France 5 dans une version unique, spécia­le­ment conçue pour une capta­tion télé­vi­suelle. C’est toujours mieux que rien, d’au­tant que c’est la première fois que Nova­rina ne met pas en scène un de ses nouveaux textes, et accepte un tiers metteur en scène. Grand bien lui en a pris, Bello­rini fait sienne cette adap­ta­tion du mythe d’Or­phée et Eury­dice avec la douceur qui le carac­té­rise.

Théâtre musi­cal primi­tif

Les choses ont leur histoire, et des claviers désar­ti­cu­lés et pianos estro­piés servent de vestige comme un ballet de fantômes, super­be­ment éclai­rés, tout en clairs-obscurs. Ce cocon musi­cal voyage entre Monte­verdi et les compo­si­tions hic et nunc de musi­ciens sur scène, conduits par Sébas­tien Trouvé, appor­tant une tendresse et chaleur humaine à la langue nerveuse de Nova­rina. Elle est d’au­tant plus belle que chaque membre de cette troupe éphé­mère d’un dizaine d’ac­teurs trouve sa place, person­nages à part entière variant les âges, les couleurs de peau, l’ac­cent ou la gestuelle, avec une mention spéciale pour un acteur-allu­mette de toute beauté, François Deblock. Tout Nova­rina est là : son inven­tion langa­gière retour­nant en perma­nence à la racine des mots, comme la comé­die volu­bile quand il s’agit de s’at­taquer à Dieu… en citant Gains­bourg ou François Hardy ! Mais c’est sans doute le rapport à la musique qui est le plus beau chez Bello­rini : on a en perma­nence l’émo­tion de la voir naître devant nous comme un mouve­ment spon­tané de l’âme, une véri­table musique de scène retrou­vant la magie de l’opéra primi­tif, celui de Monte­verdi. Rien qu’en voyant ce qui n’était encore qu’un filage, c’était déjà très beau. On a hâte de voir le résul­tat final en janvier.

Le Jeu des Ombres de Valère Nova­rina. Mise en scène Jean Bello­rini. Capta­tion sur France 5 samedi 25 juillet à 23h20. Redif­fu­sion aussi d’une autre mise en scène du nouveau direc­teur du TNP, Liliom de Ferenc Molnar, jeudi 23 juillet à 23h20. Toute la future program­ma­tion du TNP << ici >>.

Photos de répé­ti­tion au TNP : Susie Waroude.