Il y a quelque chose de pourri au royaume d’Ecosse. Le tyran est mort, la reine captive et le pays défait. Reste pour l’An­gle­terre à placer sur le trône un roi qui lui sera fidèle, vaste program­me… En adap­tant Dusi­nane de David Greig, sorte de réponse au MacBeth de Shakes­peare, le Lyon­nais Baptiste Guiton fait souf­fler un vent épique. Dans une esthé­tique sobre, à mi-chemin entre une friche indus­trielle, un clip de rock et High­lan­der, il arrive à nous faire croire à chaque scène avec une écono­mie de moyens remarquable. Une simple struc­ture en acier mobile évoque tour à tour des remparts, les appar­te­ments de la reine ou une prison. Les costumes, proches des univers steam­punk et rock apportent une touche moder­nité alors que les incan­ta­tions et les chants guer­riers enton­nés par les comé­diens instil­lent une ambiance mysté­rieuse toute écos­saise. Surtout, on est étonné de se glis­ser aussi faci­le­ment dans le texte de David Greig. Oser donner une suite à Shakes­peare aurait pu faire peur, mais ici le lien avec la pièce de Shakes­peare n’est qu’un prétexte pour trans­po­ser dans l’Ecosse Moyen-Âge des problé­ma­tiques aussi univer­selles que contem­po­raines sur l’in­gé­rence poli­tique. Et si vous n’avez pas besoin d’avoir lu MacBeth pour suivre, l’es­prit shakes­pea­rien est bien présent. Dunsi­nane passe sans complexe du tragique à des scènes de bataille ou à l’hu­mour le plus grivois, comme si on zappait fréné­tique­ment des Monty Python à Game of Thrones. Le tout porté par un excel­lente troupe de comé­diens au diapa­son. C’est le moment de débran­cher Netflix et d’al­ler au théâtre.

Dunsi­nane, de David Greig, mise en scène Baptiste Guiton. Vendredi 19 novembre à 20h30 au Tobog­gan à Décines. De 19 à 22 €. (photo Michel Cavalca)