Trois meurtres sont commis dans la petite ville de Banpo, dans la Chine reculée des années 90. « Animal à sang froid« , le « camarade policier » Ma Zhe n’arrive pas à résoudre cette énigme de « fou« . De tous les plans, Yilong Zhu est magnétique en nouveau Tony Leung. Il va être peu à peu submergé par la réalité toujours plus noire des destins autour de lui.

Troisième film du réalisateur Wei Shujun qu’on ne connaissait pas, Only the river flows est adapté d’une nouvelle peu connue de Yu Ha. « Non seulement la résolution de l’énigme n’est pas son unique enjeu, mais l’œuvre est également plus secrète que les récits policiers classiques«  note Wei Shujun. Son film aussi.

Tourné en pellicule dans un somptueux 16mm au grain typique des années 90, Only the river flows navigue en eaux troubles. D’une part autour d’une intrigue de polar, presque à la coréenne, qu’il ne perd jamais de vue. D’autre part avec des séquences poétiques somptueuses, comme le suicide le plus rapide et brutal de l’histoire du cinéma.

Only the river flows, portrait de Chine et portrait de femme

Chloe Maayan et Yilong Shu dans Only the river flows.

Si ses échappées poétiques conduisent à plusieurs scènes d’anthologie, du meurtre en plan subjectif qui termine dans une salle de cinéma (au son de la Moonlight Sonata scandée par Alfred Brendel), à l’extraordinaire scène finale du suicide raté, Wei Shujun sait très bien de quelle Chine il parle. Dans ce ton flottant qui lui est propre, chaque personnage existe. A commencer par celui de Bai Jie (Chloe Maayan), qui se bat pour garder son enfant contre les prescriptions médicales du régime…

Aussi poétique soit-il, son portrait de cette communauté de la Chine rurale est saisissant de réalisme. Il faut voir le nombre de noms au générique de fin pour comprendre le soin qu’il y a apporté… École, hôpital, bouges, procédure judiciaire ou politique de la natalité, Only the river Flows montre bien la réalité d’une Chine au quotidien comme on l’aura rarement vu à l’écran.

Un grand film en forme de métaphore politique

La métaphore politique prendra tout son sens au dernier plan, bouleversant. Quelque part entre Chabrol et Tarkovski, Wei Shujun aura réussi un polar sur la folie meurtrière, mais aussi et surtout un grand film sur la folie d’un régime. « Je voulais mieux comprendre cette décennie où je suis né, pour mieux comprendre la Chine aujourd’hui« , explique-t-il. Le résultat est un film à part dont on n’a pas fini de faire le tour, rêveur et rageur. La révélation d’un cinéaste qui vient déjà de signer un des grands films de l’année.

Only the river flows de Wei Shujun (Ch, 1h41) avec Yilong Zhu, Chloe Maayan, Tianlai Hou, Chu Bu Hua Jie… Sortie le 10 juillet.

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