Maestro. P’tit gars de Hollywood, le chef honoraire de l’ONL nous raconte en exclusivité son enfance à Los Angeles avant de fêter ses 75 ans avec l’ONL au printemps prochain… et ses rencontres avec Frank Sinatra ou… Igor Stravinski !Entretien avec un maestro au parcours d’exception, toujours aussi attaché à Lyon.

Vous avez passé votre enfance à Los Angeles et le tout Hollywood de la grande époque venait chez vous. Même Sinatra ?

Leonard Slatkin : « Oui, Sinatra était un ami très proche de la famille, comme beaucoup de gens du Hollywood de l’époque pour laquelle mes parents travaillaient comme musiciens (ils étaient memebre du Hollywood string quartet ndlr). On allait sans cesse chez les uns et chez les autres.

Quels films vous regardez encore aujourd’hui en pensant à vos parents ?

Je regarde des films tout le temps, c’est ma drogue, des vieux films comme les nouveaux. Je peux entendre mon père jouer dans Qu’elle était verte ma vallée de John Ford, ça reste évidemment un immense plaisir pour moi, et ma mère dans Deception (Complot de famille d’Alfred Hitchcock, ndlr).

C’est aussi votre maman qui joue les célèbres notes dans Les Dents de la mer…

Oui, mais elle faisait déjà peur à beaucoup de gens avant ça ! (rires)

Quels sont vos compositeurs de musique de films favoris ?

C’est toujours difficile de choisir, mais à mon âge, je dois toujours choisir la musique que je dirige. Je garde une affection particulière pour la génération des années 40-50, avec des compositeurs comme John Williams, Michael Giacchino, les Newman ou Jeff Beal.

Faites-vous une différence entre musique classique et musique de film ?

Non. C’est Duke Ellington qui l’a le dit : « Il n’y a que deux sortes de musique : la bonne musique et les autres. »

Qu-est-ce qui à vos yeux constitue le génie américain en matière de musique ?

L’extraordinaire variété des styles, à l’image de notre pays. Mais c’est vrai qu’une certaine pulsation rythmique associée à des mélodies chantantes constitue une forme de lyrisme à l’américaine.

Inversement, d’où vous vient votre attachement à la musique française ?

Mon professeur de direction d’orchestre à Los Angeles était français (Jean-Paul Morel, ndlr). C’est lui qui m’a appris ce répertoire. Mais j’ai toujours aimé écouter de la musique française, qu’elle soit classique ou populaire, depuis ma plus tendre enfance. J’ai beaucoup appris sur la façon de l’interpréter avec les musiciens de l’ONL. La musique française fait vraiment partie d’un son qui leur ait propre. L’ONL ne sonne pas comme un autre orchestre, et je ne voulais surtout pas changer ça. Au contraire.

Est-ce la mort prématurée de votre père qui fut à l’origine de votre vocation de chef d’orchestre ?

Il est mort à l’âge de 47 ans lorsque j’en avais 19. J’ai d’abord abandonné la musique pendant près de deux ans, avec l’idée de devenir prof d’anglais. Des amis bien inspirés m’ont encouragé à revenir à la musique. Sa mort m’a effectivement poussé à reconsidérer ce que je voulais faire de ma vie. J’ai alors abordé sérieusement la direction d’orchestre.

Comment à débuter votre carrière internationale ? Grâce à Bernstein ?

Bernstein fut effectivement le premier chef américain à être internationalement reconnu. Il a été un modèle pour nous tous, et nous a ouvert la voie au monde entier. Sir Georg Solti m’a aussi beaucoup aidé, en me recommandant plusieurs fois auprès d’orchestres européens.

Votre gestique de chef est exceptionnelle, et particulièrement précise. Quelle est son utilité à vos yeux ?

Pour, moi, le chef n’est qu’un autre membre de l’orchestre. Je préfère une gestique précise et minimale parce qu’elle permet davantage à l’orchestre de s’écouter et de jouer ensemble… plutôt que de se reposer sur moi !

Quels sont vos grand souvenirs avec l’ONL ?

La 11e de Chostakovitch, que j’avais dirigée à Lyon avant d’accepter de devenir directeur musical, et à laquelle j’ai tout de suite repensée lorsqu’on ma proposé ce poste. J’ai beaucoup de très beaux souvenirs avec l’ONL, mais les concerts à Tokyo ou à la Philharmonie de Berlin font assurément partie de mon top 10.

Vous dirigez Pulcinella de Stravinsky en janvier, puis LeSacre du printemps début juin. Lui aussi vous l’aviez rencontré ?

Oui, j’ai rencontré Stravinsky lorsqu’il est venu à la maison, pour écouter le Quartet de mes parents. A mes yeux, c’est vraiment le géant du XXe siècle, englobant et surpassant tous les styles. Ce sera une vraie fête que de le diriger à Lyon pour mon anniversaire. »

Propos recueillis et traduits de l’anglais par Luc Hernandez

Pulcinella de Stravinsky (+ Haydn, Clyne, Tchaikowski). Direction Leonard Slatkin avec l’ONL.Jeudi 23 janvier à 20h et samedi 25 à 18h à l’Auditorium, Lyon 3. De 16 à 49 €.

Happy birthday maestro Slatkin !

Le Sacre du printemps de Stravinsky + Concerto pour piano en fa de Gershwin avec Jean-Yves Thibaudet et l’ONL. (annulé)

Jeudi 4 juin à 20 et samedi 6 à 18h. De 16 à 49 €. auditorium-lyon.com