Mots tranchants, guitare saturée, projecteurs aveuglants, une claque qu’on se prend sans gants, Viril, la création de Virginie Despentes et David Bobée s’annonçait ardente. Elle tenait toutes ses promesses au théâtre de la Croix-Rousse en mars dernier, et devient aujourd’hui Troubles pour sa nouvelle version au Transbordeur. Comme la fabrication d’une bombe en direct. Un spectacle punk qui fait monter l’odeur de la poudre au nez. L’autrice Virginie Despentes, la comédienne Béatrice Dalle et la rappeuse Casey alternent la lecture de textes , accompagnées par la musique planante du groupe post-punk Zëro.

La bande de Troubles au grand complet.

On se fait cueillir d’emblée par la comédienne avec un extrait de King Kong Théorie, le manifeste de l’autrice : « J’écris de chez les moches, pour les moches, les vieilles, les camionneuses, les frigides, les mal baisées, les imbaisables, les hystériques, les tarées, toutes les exclues du grand marché à la bonne meuf ». Applaudissements. Dans une salle conquise, les approbations tapageuses du public viennent créer un échange rare avec les artistes.

Troubles, Despentes, du rap et des baffes

La Virginie Despentes.

Puis la chanteuse Casey vient (f)rapper avec la précision d’un coup de grolle que n’aurait pas reniée Viv Albertine. Dans un texte personnel, elle compare l’homosexualité à « un sniper silencieux qui colle une balle dans le cœur des enfants dans les cours de récréation, il vise sans chercher à savoir s’ils sont gosses de bobos, d’agnostiques ou de catholiques intégristes ». Les coups atteignent leur cible. Tout est abordé, entremêlé : le sexisme, le racisme, le patriarcat, l’hétéronormalité.

Si certaines parties déclamatoires restent un peu lourdes, pas franchement aidées par la mise en scène, c’est dans les moments incarnés que le spectacle se fait le plus percutant. Comme avec ce texte de la poétesse sud-africaine June Jordan ou cette lettre de Leslie Feinberg. Une lettre d’amour et de tristesse adressée à son ancienne amante dans laquelle elle raconte l’oppression des homosexuelles aux États-Unis dans les années 70. On sort touché, cogné, bousculé. 

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Quand Dalle et Despentes relisaient Pasolini avec le groupe lyonnais Zëro.

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