Cette rétros­pec­tive consa­crée au cari­ca­tu­riste Willem n’est évidem­ment que très parcel­laire, même si 200 dessins origi­naux sont présen­tés. Il aurait fallu un stade pour expo­ser son œuvre. La BnF, dont ils sont issus, en a acquis 20 000 !

Bern­hard Willem Holtrop, dit Willem, n’ar­rête pas de dessi­ner comme une mitrailleuse depuis le début des années 60. Les plus anciens l’ont connu chez Hara-Kiri et Char­lie Hebdo, mais une colla­bo­ra­tion de près de 40 ans avec le quoti­dien Libé­ra­tion a installé son trait carac­té­ris­tique, qu’on pour­rait quali­fier de grotesque ou carré­ment de laid, suivant les points de vue, mais jamais indif­fé­rent.

Son graphisme outré pose la sempi­ter­nelle ques­tion de savoir si l’au­teur sait « vrai­ment dessi­ner ». Pour celui qui a reçu une solide forma­tion aux Pays-Bas et l’ar­pen­teur de musées pourvu d’une rare culture artis­tique, la réponse est évidem­ment oui. La radi­ca­lité de ses dessins est un choix, en corré­la­tion avec un humour aussi radi­cal, souvent violent, très à gauche et en phase directe avec l’âpreté de l’ac­tua­lité.

Willem, l’hu­mour violent, jusqu’où ?

Un dessin assez terri­fiant comme celui d’Hit­ler levant les yeux au ciel, énonçant « On ne peut plus rien dire ! », veut tout dire. Willem cari­ca­tu­riste indi­gné est comme une porte qui refuse d’ar­rê­ter de grin­cer. Mais l’ex­po­si­tion montre d’autres facettes de l’ar­tiste : dessi­na­teur de BD (assez poilants Dick Talon, Capi­taine Capote, Fred Fallo, Claire l’in­fir­miè­re…), graphiste (magni­fiques affiches) et aussi typo­graphe déli­rant.

Sexe et livret érudit gratuit

Le dessi­na­teur, âgé de 82 ans, peut toujours choquer. En témoigne une partie de l’expo cachée derrière des rideaux où dominent sexe expli­cite, explo­sions sémi­nales et scato­lo­gie. « Willem, c’est le réel, l’ac­tua­lité avec sa gravité, ses despotes, ses curés, ses barbus, ses pollueurs, ses cons et j’en passe. L’hu­mour de Willem trans­cende toute cette merde et vous la jette à la gueule pour que vous sentiez que ça pue. Alors vous riez  », résume, en termes aussi crus qu’a­dap­tés, la cari­ca­tu­riste Coco, qui lui a succédé chez Libé. Il faut aussi saluer le remarquable travail de la Biblio­thèque qui a édité pour l’oc­ca­sion un excellent livret (gratuit) aussi érudit que péda­go­gique.