Au commencement, il y avait la pizza. Deux familles lyonnaises d’origine sicilienne ont constitué leur empire (restons raisonnable, on n’est plus au temps de Jules César) à base de ce discobole de pâte qui a conquis monde. Les frères Lonobile (7 établissements) et la famille Morreale (environ autant, si on compte les cousinages) viennent pourtant d’ouvrir quasiment concomitamment deux établissements sonnant comme un retour ému aux origines, entre Palerme et Syracuse.

Les frères Lonobile viennent d’inaugurer Nobile mare à Gerland (la Sicile des produits de la mer) tandis que Vito et Paola Morreale dévoilent Dolce by Sicilians, un condensé de la cuisine familiale insulaire. Ces derniers ont écumé les villages pour aller aux racines. On ose à peine envisager les talents de diplomate qu’il faut déployer pour soutirer à une grand-mère des recettes tenues secrètes de génération en génération (ne pensez pas à ce que tout le monde pense, rien à voir avec la tête de cheval dans le plumard).

La famille Morreale en son nouvel empire, Dolce by sicilians. (photos Susie Waroude)

Sicile rêvée et rustique

Le décor est assez évocateur d’une Sicile rêvée, avec d’énormes citronniers dégoulinant de fruits et des testa di Moro, magnifiques céramiques issues de l’amour et de la vengeance. Ce décor classieux met en valeur une cuisine dont les Morreale n’ont heureusement pas masqué le caractère rustique. Les fritto misto de poisson (genre de tempura), les arrancinis (boules de risotto panées et frites), les cannolis (des tubes de pâte croustillants frits, fourrés d’une crème à base de ricotta) ne sont pas inscrits dans les programmes de diététique à côté de la rubrique « les maillots de bain de l’été ».

Oui, mais c’est bon. On vous conseille en hors-d’œuvre le triptyque de sardines : farcie à la sauce tomate, roulée au citron, frite et vinaigrée, suivi d’un lapin farci au fruits secs. Il sont représentatifs du génie que l’on peut apporter à des produits modestes, et leur perméabilité aux multiples influences, découlant de multiples invasions (des temples grecs, des églises baroques, des édifices arabo-normands).

De fait s’entremêlent des câpres, des fruits secs, des olives, des poissons et des fruits de mer, de la saucisse au fenouil, des sauces aigre douces, du poulpe à la crème de pois chiches, de l’espadon à la pistache au sein de recettes codifiées par l’empirisme, puis protégées par le folklore. La carte des vins parcoure l’île, jusqu’aux pentes de l’Etna (séduisant Nero d’Avola de Canicatti, comme on en trouve à la Casa Nobile). Reste que le tribut à la simplicité et à l’authenticité se retrouve dans l’addition, plus contemporaine.

Dolce by sicilians. 44 boulevard des Brotteaux, Lyon 6e. 04 78 52 22 29. Fermé dimanche. Fritto misto de pesce : 19 euros. Lapin farci aux fruits secs : 27 euros. Poulpe grillé, crème de pois chiche à l’ail : 26 euros. Insalata di agrumi : 6 euros.