La fin du monde était annon­cée. Jean-Michel Sandona, plus connu sous le nom de Jean-Mi du Voxx, préve­nait depuis un certain temps qu’il avait assez de points retraite pour vendre. C’est fait. Le Voxx a changé de mains. Du calme… objec­tera-t-on, il y a quand même des sujets plus inquié­tants comme l’Ukraine, la Pales­tine ou… Aya Naka­mura.

Pour autant, la force de l’ha­bi­tude créé des mytho­lo­gies. Le Voxx est devenu à sa créa­tion, il y a 35 ans, une forme de repaire/repère pour une popu­la­tion qu’on aurait pu quali­fier d’ur­baine-bran­chée, si le mot ne frap­pait pas à la porte de l’Eh­pad du voca­bu­laire. Ce fut un siège néo-mods, Vespa et Lambretta posées sur le trot­toir. On y a vu des bastons d’an­glo-saxons. C’était il y a long­temps. La fontaine de jouvence, géné­ra­le­ment servie à la pres­sion, est que la clien­tèle n’a pas vieilli, les géné­ra­tions se succé­dant avec la flui­dité de l’ap­pa­reil de notre œuf mimosa.

Le Voxx, on prend les mêmes…

Le nouveau proprié­taire, Valen­tin (Le Florian égale­ment) a eu l’à-propos de succé­der avec un plumeau plutôt qu’un bull­do­zer. Il y a toujours des platines vinyles, le baby-foot, les graf­fi­tis sur les portes des toilettes, une jolie déco et surtout les person­na­li­tés forte­ment incar­nées qui marquent le lieu au fer rouge de l’ad­dic­tion : Nasser, Junior et Yen. La restau­ra­tion du midi, toujours éclai­rée par les larges baies vitrées a évoluée, et dans un sens ascen­dant.

Le petit frère de Valen­tin, Léo, cuisine des plats plutôt origi­naux, jeune cuisine mais dodus, comme notre blanc de poulet, ruta­baga, pesto d’ail des ours. La volaille, tendre, est comme alan­guie sur un édre­don de ce qui ressemble à une sauce hollan­daise. En réalité, il s’agit d’une purée de pommes de terre surmixée. Le chef utilise un blen­der capable de faire monter en neige la Saône toute proche. L’œuf mimosa est ce que le tag bubble est au graphiti, une version gavée comme un canard, opulente, expres­sion­niste. Et l’as­sai­son­ne­ment est puis­sant, à la Lyon­naise. C’est un dunk.

La terrasse plein Sud de Lyon 1er

Les acras de cabillaud, épinard frits (à peine, saisis au flash), avocat, pickles pimen­tés, fait coulis­ser un très agréable chaud-froid. Très claire aussi la tarte­lette au citron très crémeuse (et kala­mansi, agrume philip­pin mi-manda­rine mi-kumquat) enceinte d’un coulis au basi­lic, comme l’éclair rhubarbe choco­lat. Bon café aussi. De façon contre-intui­tive, la terrasse plein-Sud, (à l’angle du quai surfré­quenté, entre deux feux de signa­li­sa­tion) reste une de nos préfé­rées. Demeurent les vins, toujours aussi bon marché, mais toujours dans le médiocre tout-venant, qui ne demandent qu’à upgra­der (on parle évidem­ment de qualité, pas d’in­fla­tion).

Le Voxx. 1 rue d’Al­gé­rie, Lyon 1er. 04 78 28 33 87. Ouvert pour le déjeu­ner du lundi au samedi. Formule : 20 €. Menu : 24 €. Verre de Morgon : 3,50 €. A surveiller : le Voxx envi­sage de propo­ser des huîtres le dimanche.