Avant la chute verti­gi­neuse des entrées en 2020 (-70% en moyenne, Covid oblige), on avait laissé le marché lyon­nais des salles de cinéma sur une bonne tendance : augmen­ta­tion géné­rale de près de 5%, avec un retour marqué vers les ciné­mas de proxi­mité : en 2019, c’était une augmen­ta­tion de +20% qu’on obser­vait pour les ciné­mas Lumière, de +11% pour l’UGC Asto­ria, et de +5,73% pour le Comoe­dia). Indé­pen­dam­ment du désastre écono­mique actuel qui rappe­lons-le touche plus les ciné­mas – essen­tiel­le­ment privés – que les autres salles de spec­tacle – essen­tiel­le­ment publiques –, l’offre de films en 2020 s’est avant tout regroupé sur l’art et essai qui traî­nait sur les étagères de montage, favo­ri­sant les habi­tudes d’un public ciné­phile et régu­lier, au détri­ment d’un public plus large et plus jeune, faute d’offre (quasi­ment pas de block­bus­ters, encore moins de films pour toute la famille).

Carto­gra­phie des multi­plexes

La bataille des multi­plexes, parti­cu­liè­re­ment nombreux dans l’ag­glo­mé­ra­tion lyon­naise, n’avait pas eu lieu en 2019 : tous était en hausse, le podium des salles les plus fréquen­tées restant stable (Pathé Carré de Soie en 1, Mega CGR Brignais en 2, UGC Confluence en 3). La stra­té­gie des salles Pathé d’in­ves­tir dans la tech­no­lo­gie (salles 4DX, nouvelle salle Imax, Dolby Atmos…) s’était avérée payante, tandis que les salles tout confort tradi­tion­nelles d’UGC avaient elles aussi conti­nuer leur augmen­ta­tion, comme si chacun des grands groupes avait trouvé son propre public. Tout semblait donc se dérou­ler dans le meilleur des mondes. Mais ça c’était avant.

Un modèle écono­mique qui vole en éclats

Aujourd’­hui, en plus d’une hémor­ra­gie écono­mique qui n’est pas termi­née et dont on ne connait pas encore l’am­pleur, l’ar­rêt des tour­nages et de l’ac­ti­vité ciné­ma­to­gra­phique partout dans le monde a péna­lisé l’offre grand public. D’au­tant que les plus gros produc­teurs de films ont été touché de plein fouet (Etats-Unis, Chine, Inde, Corée) péna­li­sant aussi bien le diver­tis­se­ment holly­woo­dien que les films à grand spec­tacle en géné­ral (le 4DX étant par exemple une produc­tion coréenne, sans comp­ter la main mise du marché chinois sur les sorties mondiales). Bref, les stra­té­gies qui pouvaient être gagnante en 2019 sont désor­mais caduques et les multi­plexes ont du souci à se faire, d’au­tant qu’ils n’ont pas béné­fi­cié des aides muni­ci­pales à la culture contrai­re­ment aux ciné­mas Lumière et au Comoe­dia (90 000 euros chacun).

De plus en plus de monde au balcon

2021 sera d’au­tant plus cruciale que c’est l’an­née qu’a choi­sie UGC pour construire le plus grand multi­plexe de la ville : 18 salles toutes neuves et équi­pées du dernier cri sur le toit du centre commer­cial de la Part-Dieu, à ouvrir d’ici l’au­tomne. Ce sera en prime la première fois à Lyon depuis des décen­nies qu’un multi­plexe se construit en plein centre ville. Diffi­cile de ne pas imagi­ner en consé­quence un boule­ver­se­ment du marché ciné­ma­to­gra­phique intra-muros. Entre une crise de l’offre grand public, une chro­no­lo­gie de la diffu­sion des films à remettre à plat entre plate­formes et cinéma en salles, des défi­cits écono­miques abys­saux et une satu­ra­tion probable du marché des multi­plexes, le marché lyon­nais devrait connaître encore plus que d’autres son plus grand boule­ver­se­ment en 2021. Pour le pire ou pour le meilleur, en espé­rant qu’il serve avant tout l’offre faite aux spec­ta­teurs… A suivre.