C’est l’histoire d’une pauvre fille : tout le monde en dit du bien, mais tout le monde lui fait du mal. En tout cas dans le film d’Andrew Dominic. Elle voit sa mère partout, qui ne la voit nulle part… Donc elle pleure tout le temps… Même dans les plans à trois, elle reste triste… comme les chutes du Niagara (grand plan de coupe au moment de l’orgasme, sic…). On a eu l’illusion les dix premières minutes que les changements de formats d’images, le passage de la couleur au noir et blanc et la temporalité chahutée de cet anti-biopic arty nous rappelle un peu la géniale construction du roman de Joyce Carol Oates dont il est (librement) tiré… Que nenni. Ça dure 2h45, mais ça pourrait durer 6h ou 45mn tellement c’est toujours la même chose (ne vous forcez pas…). C’est juste un égo-trip névrotique dans la tête d’une icône qui ne va jamais bien, prisonnière des apparences du personnage qu’elle s’est créé pour exister, incapable d’être elle-même. Avec sa colossale finesse, Andrew Dominic fait même revenir tout au long du film un foetus en plastique in utero au cas où on n’ait pas bien compris son problème de maternité…

Ana De Armas et Adrian Brody dans Blonde d'Andrew Dominic.
Marilyn et Arthur Miller dans Blonde (Ana De Armas et Adrian Brody).

Ana De Armas et Adrian Brody, 5 minutes de bonheur

Ça se voudrait être le grand film d’auteur qui déconstruit le mythe de la star hollywoodienne, ça filme juste les étoiles qui jaillissent dans un poste de télé quand « Mister President » se fait tailler une pipe par Marilyn (resic, et de dos bien sûr, le film est aussi puritain que le sont les studios même s’ils survendent le film en promo sulfureuse). A part un joli plan final et 5mn de bonheur montre en main avec l’épatant Adrian Brody en Arthur Miller, cette Blonde n’est qu’une débauche de moyens en forme d’obscénité sans compter : le moindre plan est rempli d’effets à la lumière artificielle, de gens, de décors opulents et de surcouches d’une musique d’ascenseur pour massage New Age pourtant signée Nick Cave… Des grands noms (Ana de Armas est formidable même si elle ne ressemble pas toujours à Marilyn), des gros sous, un grand sujet cinéma… Décidément, Netflix aura tout fait pour être projeté à la Cinémathèque et à l’Institut Lumière. Même pour ce navet intello qui ne dépasse jamais le stade de la superproduction sur une pauvre fille.

Blonde d’Andrew Dominic (EU, 2h46) avec Ana De Armas, Bobby Carnavale, Adrian Brody, Julianne Nicholson, Xavier Samuel… Disponible sur Netflix (ou pas).

Andrew Dominic sur le tournage de Blonde.
Andrew Dominic en train d’essayer de cadrer son image sur le tournage de Blonde