Après une grande fresque mafieuse avec Pier­­fran­­cesco Favino et un docu­men­taire intime sur le suicide de son frère, Marco Belloc­chio s’at­taque à un fait divers qui secoua l’Ita­lie au XIXe siècle. Baptisé secrè­te­ment par sa nour­rice, Edgardo Mortara (Enea Sala puis Leonardo Maltese), 6 ans, est arra­ché à ses parents pour être élevé au Vati­can. Contraint d’em­bras­ser la foi catho­lique, il finit par aban­don­ner le judaïsme de sa mère, lui préfé­rant l’ado­ra­tion du Saint-Père.

Belloc­chio utilise ce récit d’en­doc­tri­ne­ment pour mettre en lumière les actes de l’Église catho­lique, insti­tu­tion despo­tique parfai­te­ment incar­née par le Pape Pie IX (Paolo Piero­bon). Arro­gant et tyran­nique, il n’hé­site pas à faire ramper les émis­saires juifs devant lui mais il est tour­menté la nuit par des cauche­mars où des rabbins viennent pour le circon­cire.

L'Enlèvement. Marco Bellocchio

L’En­lè­ve­ment et le poison du doute

Tout au long du récit, Belloc­chio entre­tient un certain mystère autour de la psycho­lo­gie d’Ed­gardo. Véri­table foi ou bon vieux Syndrome de Stock­holm, le réali­sa­teur filme les doutes de ce jeune homme qui oscille entre radi­ca­li­sa­tion et sursauts de rébel­lion. En plus du drame fami­lial, L’En­lè­ve­ment explore égale­ment l’évo­lu­tion de l’Ita­lie. L’af­faire devient emblé­ma­tique de la lutte pour la fin de l’État Ponti­fi­cal et l’uni­fi­ca­tion du pays.

Si la repré­sen­ta­tion du divin semble quelque peu conven­tion­nelle, le film brille surtout par sa remarquable recons­ti­tu­tion histo­rique. Belloc­chio fusionne l’his­toire person­nelle avec la grande trame histo­rique dans un souffle opéra­tique parfois un peu outré, offrant ainsi une œuvre inabou­tie mais d’une grande puis­sance émotion­nelle.

L’En­lè­ve­ment de Marco Belloc­chio (It, 2h15) avec Paolo Piero­bon, Enea Sala, Leonardo Malte­se… Sortie le 1er novembre.

L'enlèvement. Marco Bellocchio