Ç’au­rait pu être un grand film. Ce ne sera qu’un bon petit film du samedi soir, édifiant. La première qualité d’Une Vie, c’est de racon­ter la véri­table histoire de Nicho­las Winton (jusqu’aux archives du géné­rique de fin), mais de le faire avec une certaine rete­nue, so british.

Une histoire vraie dans le Prague des années 30

Helena Bonham Carter et Johnny Flynn, le jeune Nicho­las Winton et sa mère dans les années 30.

De l’aca­dé­misme (jusque dans la musique) mais pas d’hé­roïsme, une recons­ti­tu­tion soignée pour resti­tuer le Prague de 1938–39 et déjà, le sort des enfants juifs promis aux camps… James Hawles rappelle les faits en faisant défi­ler les scènes passi­ve­ment, aussi bien aidé par l’école britan­nique des acteurs toujours irré­pro­chables (ici Johnny Flynn et Helena Bonham Carter pour les années 30), que par celle de la télé­vi­sion (dont il est issu), toujours honnête dans son propos.

Nicho­las Winton, une morale de l’en­ga­ge­ment

Au moment du TV Show That’s life dans les années 80.

Car le sort des « réfu­giés » que veut sauver Nicho­las Winton en les faisant fuir pour l’An­gle­terre ne peut que réson­ner aujourd’­hui, comme sa morale de l’en­ga­ge­ment dédié à une action sans éclat, discrète, effi­cace, celle d’une person­na­lité timide, toujours tortu­rée 40 ans plus tard par le dernier train qui n’a pas pu partir.

Une Vie ne sombre jamais dans le mélo. Les séquences de larmes y sont brèves (mais irré­pres­sibles), tout comme celles de la fameuse émis­sion That’s Life qui vaudra les retrou­vailles de Nicho­las Winton 40 ans après avec nombre d’en­fants qu’il a sauvés. C’est là qu’Anthony Hopkins inter­vient, enfin.

Si on sait gré à James Hawles de ne pas en rajou­ter dans la pres­sion sur les glandes lacry­males, on regrette que la première heure du film – avant tout dédiée aux années 30 – ne condamne Anthony Hopkins qu’à ranger son bureau, plon­ger dans sa piscine ou attendre sa femme en jouant quelques notes de piano (qu’il joue d’ailleurs très bien, pour de vrai). On ne le verra fina­le­ment qu’as­sez peu…

Un petit film pour un grand Anthony Hopkins

Il n’a pas son pareil pour échap­per au trivial dans la scène la plus quoti­dienne, garder une person­na­lité de teigne derrière son sourire en coin d’un petit « hum » ou vous boule­ver­ser d’un simple « merci » comme le grand-père qui vous a toujours pris dans ses bras. Il use de son anglais pincé comme de son regard perçant ou étonné. En une simple séquence, il parvient à faire passer les remords d’une conscience, la volonté revêche d’échap­per à toute publi­cité, comme la joie souriante d’avoir réussi une forme de trans­mis­sion. (Nicho­las Winton mourra à 106 ans !)

Qu’Anthony Hopkins soit aussi crédible dans de tels trans­ports d’hu­ma­nisme que dans son rôle mythique d’Hanni­bal Lecter suffit à démon­trer l’éten­due de son talent. Encore deux fois plus grand que cette moitié de grand rôle.

Une Vie de James Hawes (GB, 1h49) avec Anthony Hopkins, Johnny Flynn, Helena Bonham Carter, Lena Olin, Romola Garai… Sortie le 21 février.

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