C’est le chef-d’œuvre absolu de Kazan. A la fois pamphlet social bidon­nant contre l’Amé­rique puri­taine et mélo flam­boyant sur l’amour fou avec une Nata­lie Wood touchée par la grâce. C’est sans doute l’œuvre du réali­sa­teur qui croise le mieux la rage des senti­ments indi­vi­duels et l’écra­se­ment de la conscience collec­tive, dans un Tech­ni­co­lor inso­lent. Maître d’œuvre de l’Ac­tor’s Studio, Kazan reste l’in­car­na­tion de points de vue assu­més, de conflits drama­tiques qui vibrent sous nos yeux, pas de ces drames mous démis­sion­naires qui prétendent ne rien juger et se dévi­ta­lisent en voulant ména­ger chaque person­nage (le père, ici passa­ble­ment effrayant). Ce qui n’em­pêche ni la complexité, ni le dépas­se­ment ou la compas­sion. Nata­lie Wood devien­dra l’icône de toute une géné­ra­tion, en plus de tour­ner La Fureur de vivre avec James Dean visible aussi dans la rétros­pec­tive. Dans une des plus belles séquences de l’his­toire du cinéma –  la plus belle fin qu’ait tour­née Kazan selon lui et il était intran­si­geant avec lui-même – il faut avoir vu Nata­lie Wood regar­der l’homme qu’elle a désiré jusqu’à la folie avoir un enfant avec une autre, et repar­tir digne, rassé­ré­née, pour savoir ce qu’ai­mer veut dire. Sublime, forcé­ment sublime.

La Fièvre dans le sang d’Elia Kazan (Splen­dor in the grass, EU, 1961, 2h04) avec Nata­lie Wood, Warren Beatty, Barbara Loden… Jeudi 21 janvier à 21h puis jeudi 10 février à 18h30. Dans la cadre de la rétros­pec­tive Nata­lie Wood à l’Ins­ti­tut Lumière, Lyon 8e. Tarif habi­tuels.