Les Huit salopards de Quentin Tarantino, c’est un peu 8 femmes de François Ozon, mais façon gros connards. Son film le plus noir, qui pue la mort, duquel personne ne sortira indemne. A revoir au Pathé Bellecour dans un cycle consacré à QT.

Plus que jamais l’héritier de Sergio Leone, après Inglorious Bastards – son chef-d’oeuvre – Tarantino revenait en 2015 pour un croisement entre le western américain des grands espaces enneigés et un jeu de massacre façon Cluedo. Road movie n’allant nulle part, Les Huit salopards bifurque en cours de route pour s’arrêter dans l’auberge de Minnie, tournant au huis clos sanglant, découpé en flashbacks et twist final. C’est un peu 8 Femmes de François Ozon mais façon gros connards, avec shérif, chasseur de primes et manteaux de fourrures de trappeurs. En héros, Kurt Russell semble revenu de nulle part, absent du cinéma depuis trop longtemps.

Kurrt Russell, Jennifer Jason Leigh et Bruce Dern en chantant !

Le générique christique d’Ennio Morricone

Ce n’est pas pour rien : avec une gravité nouvelle, le huitième film de Quentin Tarantino pue la mort, réduisant ses personnages à des icônes pathétiques d’un mausolée cinématographique. Ceux qui s’attendent au fun habituel en auront pour leur grade. Magnifié par le 70mm et la musique expressionniste d’Ennio Morricone, le générique christique ouvre même sur une forme de contemplation à la blancheur immaculée, inédite chez Tarantino. Les fans retrouveront tout ce qu’il aiment chez QT que ses détracteurs abhorrent : tics à répétition (la porte qui ne ferme pas), auto-citations et radotages, et surtout dialogues interminables tirés à la ligne.

Les thèmes politiques rebattus (violence, racisme, misogynie) débouchent sur un exercice de style brillant, avec quelques caméos réjouissants (Channing Tatum). Reste une belle idée, houellebecquienne: celle d’une impuissance virile qui s’autodétruit dans une séquence de fusillade finale avec des « héros » qui ne sont plus que des pantins impotents. Tarantino est toujours moins superficiel qu’il se donne à voir. Le cycle du Pathé Bellecour est l’occasion de revoir sur grand écran ce qu’il a gardé sous le plaid. Dépêchez-vous : la séance est déjà bien remplie…

Les Huit Salopards (The Hateful eight, 2016, EU, 3h07) avec Tim Roth, Kurt Russell, Jennifer Jason Leigh, Samuel L. Jackson, Bruce Dern, Channing Tatum… Lundi 21 novembre à 20h au Pathé Bellecour, Lyon 2e en Onyx Led. Tarifs habituels.