Après Jeune femme, son beau premier film, Léonor Saraille signe un second long-métrage encore plus ambi­tieux, portrait d’une famille immi­grée origi­naire de Côte d’Ivoire sur plusieurs dizaines d’an­nées. A la façon du Boyhood de Richard Link­la­ter mais dans un contexte on ne peut plus français, on voit gran­dir ce “petit frère” de la fin des années 80 à aujourd’­hui. Il ne devien­dra le person­nage central qu’en fin de film, lorsqu’il sera devenu ensei­gnant (magni­fique Ahmed Sylla).

Léonor Saraille ose faire un film choral sur celui qui est resté à l’ombre d’une mère courage parfois écra­sante (extra­or­di­naire Anna­belle Lengronne, lumi­neuse et comba­tive, obsé­dée par une réus­site factice pour son fils) et d’un frère délinquant. C’est le prix de l’éman­ci­pa­tion fami­liale et sociale qu’elle filme, cette quête d’une “joie sans cause” dont parle Flau­bert à l’école, qui ne peut s’ac­qué­rir que par une forme d’éloi­gne­ment à l’in­té­rieur même de la famille.

Ahmed Sylla, le petit frère devenu grand.

Quand sa mère veut encore s’oc­cu­per de sa coupe de cheveux ou de son mariage, son enfant devenu grand lui répon­dra simple­ment : “c’est pas prévu”. Ce beau film sera resté atten­tif tout du long à ces petits riens qui font la riche huma­nité des gens ordi­naires, désor­mais capables de la véhi­cu­ler autour d’eux. “C’est pas rien, un petit frère” finira-t-il par lire comme une recon­nais­sance tardive de sa place à l’in­té­rieur du foyer. Magni­fique.

Un petit frère de Léonor Saraille (Fr, 1h56) avec Anna­belle Lengronne, Stéphane Bak, Ahmed Sylla, Kenzo Sambin, Laeti­tia Dosch, Jean-Chris­tophe FollySortie le 1er février.