Les inter­prètes ne font pas toujours bon ménage à la tête des insti­tu­tions, en tout cas pour la danse. Après Benja­min Mille­pied en son temps à l’Opéra de Paris, c’est au tour de Julie Guibert de « mettre fin à ses fonc­tions » de direc­trice à la tête du Ballet de l’Opéra de Lyon. Nommée en février 2020 dans un contexte diffi­cile, non seule­ment elle a pâti du confi­ne­ment décrété juste après sa nomi­na­tion, empê­chant tout élan, mais elle a aussi été choi­sie peut-être un peu trop rapi­de­ment dans la foulée du scan­dale touchant son prédé­ces­seur, Yorgos Loukos, grande figure de la danse à Lyon, licen­cié après avoir été mis en cause pour son atti­tude envers certaines danseuses.

Si Julie Guibert, très exigeante, reven­diquait de « nouvelles esthé­tiques » qui pour elle « ont marqué un virage artis­tique et profes­sion­nel déci­sif », pas sûr qu’il en soit de même pour le ballet. La danse abstraite non dépour­vue d’ex­cès théo­rique semblait enfer­mer un des plus dyna­miques ballets de la scène natio­nale dans des spec­tacles ou des reprises para­doxa­le­ment assez datés – comme en témoigne la reprise de Lucinda Childs le mois prochain – manquant singu­liè­re­ment de diver­sité. On pouvait par exemple voir vanter dans le programme “une danse libé­rée de toute théâ­tra­lité, à la manière d’une toile abstraite, visant l’ex­pres­sion de la pure essence”. Pas sûr que cette abstrac­tion reven­diquée à tous les étages fut du goût de tous, en interne comme en exter­ne…

C’est désor­mais la tête du ballet de L’Opéra de Lyon qui se trouve « libé­rée ». La nouveau direc­teur Richard Brunel a désor­mais tout loisir de choi­sir un nouveau projet, plus adéquate avec la dyna­mique de cette grande maison.

Photo : Julie Guibert à l’Opéra de Lyon (Susie Waroude).