On débarque dans Une cérémonie comme dans un vieux rade bruxellois choisi au hasard, guidé par le tapage nocturne et une bonne humeur contagieuse. Sur la scène, au milieu des pianos, des violoncelles et des confettis, émerge une armée de chaise de jardin malmenée par les comédiens au grès des verres « de calva ». Plus haut, l’énorme squelette d’un ptérodactyle flotte, bat des ailes et nourrit ce sentiment d’admirer un cabaret dada. La comédienne du Raoul Collectif prévient d’emblée : « Nous ne connaissons pas l’ordre de ce qui va suivre ». Libre à nous de la croire ou non. Les neuf énergumènes trinquent, chantent, philosophent et se coupent la parole avec une spontanéité évidemment toute maîtrisée. C’est là toute la force du collectif Belge que d’arriver à nous faire croire que tout est improvisé.

Le sens de la fête à la Croix-Rousse

De bagarre d’ivrognes en cascade de saltimbanques en passant par un Minotaure palpeur de spectateur, le Raoul Collectif déploie toute son énergie au plaisir du public. Jusqu’à une réécriture d’Antigone qui vient prouver que le collectif ne manque ni de profondeur ni de talent dramatique. Car toute cette joyeuseté ne saurait cacher l’entreprise chevaleresque (c’est eux qui le disent) dans laquelle les personnages se sont engagés. Un comédien porte un toast à l’imprévisibilité actant que « c’est la seule manière d’être ingouvernable ». Faut-il se révolter ? Et avec quelles armes ? Il érige l’imprévisible en vertu face à l’incertitude ambiante. C’est encore plus vrai aujourd’hui que lors de la présentation de la pièce au Festival d’Avignon en 2020. Annulé plusieurs fois pendant l’épidémie, on peut dire que ça valait le coup d’attendre, car avec le Raoul Collectif, nos désirs sont désordres (joyeux).

Une Cérémonie du Raoul Collectif, jusqu’au vendredi 18 mars à 20h au Théâtre de la Croix-Rousse, Lyon 4e. De 5 à 27 €.