Lyon des milliers d’années avant Lugdunum et les Romains

Le vallon de Gorge-de-Loup est un lieu de vie entre colline et rivière. Dans l’ombre bienfaitrice de la colline, non loin de la Saône, sur l’emplacement de ce qui serait aujourd’hui le quartier de Gorge de Loup, une communauté s’est installée depuis quelque temps. Les bords de Saône, plus calmes que ceux du Rhône, offrent un contexte favorable à l’installation de petits groupes. Personne ne chôme au milieu des cinq habitations qui composent le hameau.

Illustration : Tiphaine de Cointet.

Préhistoire à Vaise : une journée dans la vie des premiers habitants

Devant la maison la plus au sud, un homme et une femme tissent des peaux entre elles, pour en faire une parure. À leurs côtés, un homme affûte des outils en bronze alors qu’un peu plus loin, un cerf débusqué ce matin est en train d’être dépecé. Les habitations aux toits de chaume sont toutes bâties sur le même modèle, avec de larges poteaux porteurs enfoncés dans le sol, renforcés par des clayonnages, assemblages de pieux et de branchages soutenant l’édifice et servant de façades. Celles-ci sont complétées par du torchis (mélange d’eau, d’argile et de fibres), qui assure l’isolation de l’intérieur. Au centre de chaque maison, un foyer de pierre ou un four. La fumée produite se disperse dans le chaume et éloigne notamment les insectes. Autour des habitations, des palissades en bois. Pour se protéger ou délimiter une parcelle ? On n’a aucune certitude à ce jour.

Maison à grain par Nicolas Duboc.

En contrebas du hameau, dans un champ de blé près de ce qui serait aujourd’hui le quai Arloing, deux hommes sont occupés à faucher les mauvaises herbes à l’aide de faucilles. Il sera bientôt temps de moissonner mais aussi de récolter les fruits des arbres alentours. En attendant, des jarres enterrées près des maisons fournissent graines, céréales et légumineuses, comme les fèves, les pois et les lentilles. Ainsi à l’abri des rongeurs, elles peuvent être conservées plusieurs mois.

Lyon, un carrefour de rencontres à la Préhistoire

Scène de chasse (illustration Nicolas Duboc).

Les heures filent ainsi quand un événement vient briser la monotonie de la journée. Au loin, un attelage apparaît. Une modeste charrette lourdement chargée est tirée par un cheval, lui-même conduit par un homme à pied. Celui-ci est connu du hameau. Il passe dans la région, à intervalles irréguliers, toujours dans le même but : récupérer du bronze. À l’époque du Néolithique (5500 – 2500 av J.C.), la région lyonnaise est une plaque tournante, un carrefour de rencontres. Rien n’indique que le commerce se faisait de cette manière, mais des échanges existaient déjà.

Un homme et son outil. (Nicolas Duboc)

Les hommes du hameau regroupent les morceaux épars, abîmés, d’outils en bronze, qu’ils donnent au colporteur. Celui-ci les apportera ailleurs, dans un endroit où ils pourront être refondus et battus à nouveau. En échange, le voyageur sort de sa charrette un certain nombre d’objets prêts à l’emploi. Des haches, des aiguilles, des poignards, et même des lingots en cuivre, presque purs. Il arrive des Préalpes, dans l’est.

Il a suivi le cours du Rhône et s’apprête désormais à remonter la Saône, dont les berges sont régulièrement peuplées de petits hameaux, au moins jusqu’à Mâcon. L’homme suit parfois le Rhône jusqu’à la Méditerranée, certains de ses lingots ayant été retrouvés en Camargue. Le Gier, qui alimente aussi le Rhône, est l’un des autres axes de transit importants. Il permet de rejoindre l’Auvergne et ses volcans. Plaque tournante, la région lyonnaise subit les influences de bon nombre de cultures, du sud du bassin parisien à la Méditerranée, en passant par le Jura et la Suisse.

Lyon et ses céramiques locales préhistoriques

Foyer du Néolithique retrouvé à Lyon. (@SAVL)

Une influence visible notamment sur les jarres, pots et autres récipients en céramique. S’ils sont produits localement, leurs décorations témoignent de modes venant des quatre points cardinaux. Le voyageur a repris sa marche vers le nord, vers Vaise et l’île Barbe alors que la nuit s’étend sur la plaine lyonnaise. Au fil des années, la démographie va s’accélérer.

Le peuplement de la plaine de Vaise va se densifier. À la toute fin de l’Âge du Bronze, vers -900, l’île Barbe sera occupée par un village. Des traces d’habitation de plus en plus nombreuses sont retrouvées dans toute l’agglomération lyonnaise. Les échanges iront en s’intensifiant. Avant même la constitution de la colonie romaine, avant de devenir la capitale des Gaules, avant la Part-Dieu et la gastronomie, Lyon est déjà un carrefour, un confluent de cultures. L. D.

La Préhistoire à Lyon en cinq dates :

  • – 30 000 av. J.C. : La grotte Chauvet
  • – 10 000 av. J.C. : premières traces d’occupation à Lyon
  • De – 5500 à – 2200 av. J.C. : Néolithique, première traces d’habitation sur le plateau de La Duchère
  • – 2200 av. J.C. : début de l’Âge de Bronze.
  • – 900 av. J.C. : fin de l’Âge de Bronze
La grotte Chauvet. (DR)

Prochain épisode de notre Histoire de Lyon : Fourvière au temps de Lugdunum.

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