Clémenceau disait « la guerre, c’est une chose trop grave pour la confier à des militaires ». On pourrait renchérir en avançant que la cuisine sans viande est un sujet trop important pour qu’on la confie à des végétariens. Les temps ont heureusement changé. La culture de la cuisine au quinoa, légumes à l’eau et graines pour hamster a semble t-il fait son temps. Notamment sous l’influence de chefs omnivores. Adrien Zedda qui a fait de Culina hortus « le meilleur restaurant végétarien du monde », cuisinait parallèlement de la viande dans le restaurant en face. La cuisine du végétal n’est plus considérée comme un avatar de médecine douce, mais tout simplement comme de la cuisine, source de plaisir. C’est le cas du chef d’Archange, restaurant traditionnel, qui avait laissé ses ailes au vestiaire (Lyon 1er) pour renaître il y a quelques jours sous la forme de Brocoli. Ce légume vert est l’ennemi de la petite enfance, mais devenus adultes ils finissent par l’adorer (un peu comme la bière).

Raviolis contre brocolis

Bref ce midi là, il n’ y avait pas brocoli, mais raviolis. C’est bon, bien marqué, avec un petit côté asiatique que l’on situerait vers la Corée. Le chef Rémi – comme dans Ratatouille – fait dans le détail. Le plat est traversé par les éclairs verts tendre d’asperges sauvages et miné de petites billes de la taille du caviar. En fait, aucun poisson n’est mort pendant le tournage : ce sont des algues sphérifiées, qui craquent sous la dent. Habituellement, on ne se sent pas trop à l’aise avec les imitations de type merguez végan et « faux gras » végétal. Mais, en l’occurrence, le faux « foie gras » dont les saveurs sont aussi proches de Sarlat que l’est Vladivostok, est réussi. La texture est onctueuse, l’ajout d’un peu d’« huile de truffe » et pas mal d’Armagnac constitue un expérience intéressante, de même que le diadème de fleurs comestibles qui le souligne. Si la salade d’artichauts et samoussa de légumes était peu oubliée au bord de la route comme mémé à la station Total un jour de grands départs, on a aimé le tempérament et l’assaisonnement d’un pavé de pleurotes, gratin de panais, vermicelles de carottes frites, petit pois, pleurotes sautées. Et le bonus mystère : d’étonnantes lanières nouées, d’une texture extraterrestre, se révélant être de la peau de tofu. Les desserts sont en forme de happy end : ganache au chocolat extra dense bien cacaotée, glace au sésame noir ; glace à la betterave compotée de rhubarbe pétales de noix de coco. Délicieux.

Brocoli. 71 rue Masséna, Lyon 6e. 04 78 24 35 27. Fermé samedi midi et dimanche. Formule midi : 19, 50 euros. Menus : 24, 50 euros (midi) et 29 euros (soir).