Ce nouveau petit restau­rant est caché en face de la gare Saint-Paul, promesse d’exo­tismes ferro­viaires (Tarare, l’Ar­bresle). La cheffe Sarah Hamza donne aussi dans le voyage. Elle traite les dattes Medjoul en tempura, enferme le lieu noir dans du kadaïf (sorte de nid crous­tillant de fins vermi­celles, proches du cheveu d’ange) et s’est spécia­lisé dans le ris de veau au tama­rin, son plat grigri.

On a avait déjà goûté sa cuisine à L’Ate­lier, place Carnot, quand elle travaillait pour d’autres, mais n’hé­si­tait pas à propo­ser des moules glacées ou un thon cru mariné dans du bissap (jus d’hi­bis­cus séné­ga­lais) et de la cher­moula (mari­nade maro­caine). Enfin à son compte, reine mère en cuisine ouverte, avec Söma, elle conti­nue à se fabriquer un common­wealth d’in­fluences.

Söma, une cuisine sautée qui vient du Sud

Beau­coup sont appor­tées par le vent du Sud, comme la chape­lure de merguez qui couronne une entrée assez marrante, pleine de pièces dont on doute qu’on ait pu arri­ver à en faire un puzzle. On se dit que Sarah Hamza aime bien cuisi­ner comme on fait du tram­po­line. On saute, on saute… Le tout est de ne pas retom­ber à côté, une frac­ture de cuisse de poulet est si vite arri­vée. La cheffe rebon­dit.

Ainsi, sous ce sable de merguez, il y a une cervelle de canut (mais pas du tout aillée, un peu comme un chat dont on aurait coupé les griffes). Celle ci chapeaute, telle la neige au sommet du mont Ventoux, un taboulé de chou-fleur. Il est râpé à cru, offrant plus de fraî­cheur et de sensa­tion végé­tale que sous son état rôti. A cette graine d’in­fluence cous­cous­sière, elle a ajouté de l’hi­bis­cus et de l’es­tra­gon ainsi que de la sauce yuzu et ponzu (un accou­ple­ment d’agrumes et de sauce soja).

Le final régres­sif selon Söma

Sarah Hamza, reine mère de chez Söma.

Sans oublier les pickles de graines de moutarde. A ce stade le cerveau essaie de s’échap­per pour fumer une clope dehors, il n’in­tègre pas tous les rouages. Pour­tant ça marche : frais, aéré, parti­cu­liè­re­ment agréable. On a bien aimé aussi les petits blocs de tapioca à l’em­men­tal, frits, à trem­per dans une mayon­naise à l’ha­rissa, d’ins­pi­ra­tion street food mais qui ne fait pas le trot­toir.

On a aussi appré­cié le parti-pris, radi­cal, de donner l’équi­valent d’une attaque au lance-flamme sur une fabrique d’al­lu­mettes au poulet, préa­la­ble­ment cuit à basse tempé­ra­ture dans du vinaigre de cidre. La limite du cramé volon­taire apporte de bonnes saveurs. Si la fragola (pâtes en forme de billes) au beurre de caca­huète était trop linéaire, une route sans tour­nants, le dessert, un banof­fee cara­mel au miso (banane/toffee) remplis­sait son rôle de final régres­sif. Petit, mignon, souriant et créa­tif.

Söma. 9 place Saint-Paul, Lyon 5e. 06 80 26 81 77. Ouvert du mercredi au samedi soir. Vendredi samedi et dimanche à midi. Formule 21 € menu 26 € (midi). Carte du soir : comp­ter entre 40 et 50 €. Rouge de chez Marcel Richaud (Cairanne), A la source : 28 €.