Le nom de ce restaurant ressemble à un titre de roman d’héroic fantasy. Mais non, rien à voir, les épées magiques et elfes sont hors de propos. D’ambre non plus, tables et couverts ne sont sertis. Il s’agit simplement d’un hommage du cuisinier Florent Gilibert à sa fille. Comme le chef a arpenté des restaurants de type Troisgros à Roanne et Oasis à la Napoule, il sert presque par réflexe des amuse-bouche. Même pour notre menu déjeuner à 24 euros -très bon plan. L’amuse-bouche (à ne pas confondre avec l’amuse-gueeeeule lyonnais à base de bonnes targettes de sauciflaille) est le plus souvent un gadget superfétatoire de style dé à coudre de gaspacho. Là, une fine tranche de paleron froid sous un mélange de cubes nains de concombre et de pomme Granny Smith, piqués d’une pointe de pesto de fanes de radis, suscitent immédiatement l’intérêt, et propulsent l’appétit.

Cuisine en double croisé ou comment piquer dans l’assiette de son voisin

Quand, de surcroît, on s’est déjà aiguisé avec un verre d’un de nos blancs de base préféré Chapeau Melon (Val de Loire type muscadet, sauvignon et melon 50/50, riche, citronné, plamplemoussé, 12 °), on a le pied ailé sur les starting-blocks. On a ensuite expérimenté en doublé croisé, discipline culinaire qui consiste à piquer dans l’assiette de son voisin, le menu « Cuisine du marché » du midi et le Menu d’Ambre (45 euros). En entrée côté « marché », une originale mousseline de pommes de terre, purée dense, onctueuse, petites pomme de terre taillées en canon et crème de hareng fumé émulsion légère, élégamment présentée en monticules torsadés comme pour un dessert. Le tout traversé par un éclair d’origan. Voilà une cuisine claire, comme le tartare de daurade, réussissant un accord sur lequel on n’aurait pas parié : pop corn et agrumes. Mais ça marche. Côté marché : du lieu noir aux côtés d’un risotto d’orge perlé au basilic (une réussite), sauce homardine. Encore une bonne idée, comme le cochon du menu voisin décliné en filet, rosé, poitrine croustillante (vous entendez ce bruit quand on marche sur des graviers), cromesquis d’andouillette (prix du meilleur acteur dans un second rôle) et crème de boudin noir. Seule la purée de carottes des sables était insignifiante, ensevelie sous une dune. On finit par d’excellents desserts, un pinacoladesque ananas, crème coco, fève de tonka pour le menu du jour. La terrasse a peu d’intérêt, sinon la vue sur le sympathique magasin Les Thés sur terre. On préfère l’intérieur. Quant au service, il est parfait, attentionné mais pas servile, de bonne humeur sans faire son show.

La table d’Ambre. 46 rue Franklin, Lyon 2e. Fermé dimanche et lundi. 04 72 24 56 12 76. Formule : 20 euros (midi) Menus : 24 euros (midi) 45 et 60 euros. A la carte : Cabillaud, épinards, asperge blanche, émulsion d’ail, poulpe et palourdes ; canard en tataki, vinaigre de mangue brocolis et shiitaké etc.