Après travaux, le Café Arsène, dont nous gardons un très joli souvenir, s’est transformé en Arsëne. Il y en a qui ont le sens des grands changements, se dira-t-on. Arsëne avec tréma fait un peu plus meuble Ikea, mais rien de suédois pour autant… L’équipe a changé (à part Mathilde, au service). La déco aussi. Le plafond en voûtes d’ogives, toujours là, pourrait passer pour un reliquat de la défunte abbatiale d’Ainay.

Arsëne, nouveau café, nouvelle déco

Les murs sont faits d’une matière que l’on cache habituellement : de l’isolation phonique, effet paille compressée dans du béton. C’est malin, c’est moderne. Comme la cuisine d’ailleurs. Jules Duroc, dont le nom respire le feuilleton populaire du XIXe siècle, est pourtant dans le temps présent de la jeune cuisine qui avance en faisant des appels de phare.

De « l’eau de tomate » à Ainay…

Ainsi cette entrée assez simple et pourtant vectrice de sensations complexes qui s’intitule « tomate ». Le fond est de l’« eau de tomate ». C’est ce qui reste quand on a extrait l’eau de végétation de la chair, une sorte d’extraction où il ne reste que l’âme de la tomate, si tant est que les tomates aient une âme. Il y a encore de la chair de tomate, logique, et la peau de la tomate séchée en légers voiles posés sur la surface. Et là, l’histoire prend des chemins de traverse : il y a des dattes qui apportent un peu de langueur et ce qui ressemble à des fraises fantômes transformées en pickles pour la touche acide. Ces spécimens albinos n’ont pas blanchi de peur qu’on les attrape, mais on simplement manqué de rougir nues au soleil.

Feuilles de shiso et épices

Le grignotage des parcelles de feuilles de shiso (Asie et notamment Japon) provoque l’effet passage dans l’hyperespace en Faucon Millénium. C’est violent, mentholé, épicé, avec des accents de coriandre. C’est de la gastronomie simple et sans nappes. Osé aussi à déjeuner, le chou rouge « choucrouté » servant de base à un espadon recouvert une œuvre abstraite composée de fromage blanc et de ketchup de cerise. Le chef, qui est passé chez Jean Sulpice, Les Apothicaires, Troisgros, n’a pas peur du format bistrot.

Arsëne à Ainay, un format bistrot un peu cher

On a aimé sa version de tielle sétoise (vinaigrette safranée), son « maki » d’espadon (citron confit concombre). On se demande cependant, remarque en passant, pourquoi les cœurs de canard (reine des prés, artichaut, basilic thaï), un des produits les moins chers du marché, font 22 euros… Reste que la formule du midi reste d’un excellent rapport qualité-prix. Les desserts restent collés aux très classiques du néo-bistrot, du sablé breton et son crémeux à la panna cotta. On notera aussi l’accueil et les conseils liquides de Romane, ainsi qu’un détail aussi minuscule que fondamental, du bon pain dans la panière.

Le Café Arsëne. 2 rue Vaubecour, Lyon 2e. 04 78 05 41 68. Fermé samedi et dimanche. Formule : 27 euros (midi). Menu : 32 euros (midi). Soir : compter 55 euros.