Christopher Nolan a toujours aimé les scènes d’action les plus réalistes possibles (Dunkerque), usant le moins possible d’images de synthèse, mais en les plongeant au milieu des scénarios les plus alambiqués possibles, en multipliant les faux-semblants et les allers-retours dans le temps (Memento, Le Prestige). De ce point de vue, Tenet est bien du pur Nolan, blockbuster mâtiné d’obsessions techniques et de vertiges temporels.

La bonne nouvelle quand il est sorti en fin de Covid, c’est qu’on retrouvait enfin sur grand écran des scènes d’action époustouflantes, filmées avec la plus grande maestria visuelle dans pratiquement tous les styles : baston mains nues, guerre, attentat au concert, poursuite en voilier, bataille dans le ciel et même une cascade en voiture un peu particulière en effet, qu’on vous laisse découvrir…

Robert Pattinson sous-employé

La moins bonne, c’est que le prétexte scénaristique (« tenet » veut dire « précepte« ) pour les mettre en scène devient de plus en plus vaseux. Ce n’est plus Inception mais Inversion et dans sa dernière heure, le film accumule jusqu’à la saturation les aphorismes foireux (« le monde est en clair-obscur« , « chaque génération lutte pour sa survie« …) et les concepts creux (« étau temporel« , « entropie« )…

Particulièrement dans la bouche de l’ordure parfaite incarnée par Kenneth Brannagh (avec l’accent russe, WTF). La musique franchement pénible de Ludwig Göransson est à l’avenant, remplaçant à mauvais escient Hans Zimmer, le compositeur inspiré des précédents films de Nolan.

Robert Pattinson et John David Washington.

Le puritanisme qui exclut toute sensualité dans cette intrigue d’un couple brisé par un protagoniste noir (JD Washington, le fils de Denzel) finit de nous rappeler que sous le luxe technique, ce Tenet n’est malheureusement qu’un pur produit hollywoodien de plus. Comme un James Bond cérébral se prenant sévèrement au sérieux, reléguant un peu trop rapidement son humour british et Robert Pattinson, sous-employé, pour raccrocher les grosses ficelles d’antan : une mère qui veut sauver son fils et un soldat qui veut sauver le monde. S’il a « sauvé » les entrées des cinémas en sortie de Covid, tant mieux, de là à la revoir pendant 2h30 à la maison, il n’y a pas d’obligation…

Tenet de Christopher Nolan (2020, EU, 2h30) avec John David Washington, Elizabeth Debicki, Kenneth Brannagh, Robert Pattinson, Clémence Poésy… Disponible sur Netflix.