2h56 pour constater qu’on a eu un problème avec son père, c’est sans doute très court pour une psychanalyse, mais ça peut vite apparaître beaucoup trop long au cinéma.. En tout cas pour faire tenir sans ennui un film de super-héros. Nouveau réalisateur de cette franchise qui revient aux sources, Matt Reeves connaît ses classiques (il est l’auteur de Cloverfield, film SF assez inspiré en 2008).

Dans son Batman, il fait tout le temps noir, il pleut souvent et on cherche les indices d’un meurtre à l’autre comme dans Seven, le chef-d’oeuvre de David Fincher. Et le personnage de Paul Dano s’inspire du dernier Joker avec Joaquin Phoenix : un psychopathe sur fond de chaos politique et de colère sociale en appelant à la défiance démocratique en plein élection, sans oublier le clin d’oeil woke opportuniste.

La Batman de Robert Pattinson a bien les cornes

Même les scènes d’action frisent le crépuscule.

Une fois ces bases posées, ce reboot est un long tunnel dans les bas-fonds de Glasgow (où a été majoritairement tourné le film) dans lequel tout le monde fait la gueule sous le joug d’une psychologie torturée, à commencer par le personnage principal.

Attention, ce Batman alternatif ne manque jamais de brio (l’ouverture ou la séquence d’inondation), mais son homogénéité esthétique devient rapidement aussi lassante qu’elle apparaît manifeste dès la première image : cuivres bourrins symphoniques à chaque apparition de la cape, noirceur et contre-jours permanents sur fond de trash movies réalistes pour filmer la terreur…. Bienvenue dans un monde en ruines.

Batman et des seconds rôles méconnaissables

Colin Farrell, méconnaisable en Pingouin.

Ce n’est pas tant en face du Batman au teint d’endive de Robert Pattinson qu’on a le sentiment de se retrouver (on l’a connu plus inspiré, lire notre portrait), que derrière son masque, à finir par voir tout, tout, tout en noir, même son baiser à Catwoman (Zoé Kravitz qui ne fait pratiquement que passer). Cette version alternative est donc avant tout un trip de metteur en scène à destination des critiques, exercice de style façon imagerie indé, souvent impressionnant dans la réalisation des séquences, mais franchement lassant à la longue avec des personnages pas plus consistants qu’au magasin de farce et attrapes.

Avec un casting de seconds rôles alléchants mais qu’on reconnaît à peine (Paul Dano s’excitant tout seul dans sa cage, John Turturro jouant une énième fois le mafieux de service et Colin Farrell totalement méconnaissable en Pingouin). 3h pour un film qui nous laisse dubitatif comme les nombreux points d’interrogation qui le jalonnent tout du long.

The Batman de Matt Reeves (EU, 2h56) avec Robert Pattin­son, Zoë Kravitz, Paul Dano, Jeffrey Wright, Colin Farrell… Lire aussi un autre avis sur le film.