Tout commence par un accident de friteuse. Alors que Sylvie (Virginie Efira) travaille d’arrachepied dans une boite de nuit, son plus jeune fils Sofiane (Alexis Tonetti) met le feu à la cuisine et se brule le torse avec de l’huile bouillante. Rien de grave, mais suffisamment pour que la police s’interroge. De fil en aiguille, les choses vont prendre une tournure désastreuse, à commencer par l’irruption des services d’Aide Sociale à l’Enfance qui, par précaution et pour s’assurer qu’il ne s’agit pas d’un cas de maltraitance ou négligence, décident de placer Sofiane dans un foyer.

Déterminée à récupérer son fils, Sylvie va essayer de combattre la machine judiciaire, chercher un nouveau travail, faire bonne figure et surtout rester « calme » comme lui conseille son entourage.  Mais les interrogatoires successifs et la peur de perdre définitivement son enfant vont progressivement la faire dévisser et faire s’écrouler l’équilibre précaire de la famille.

Rien à perdre Virginie Efira

Félix Lefèbvre et Arieh Worthalter en seconds rôles touchants

Si le film trouve principalement sa force dans l’interprétation poignante de Virginie Efira, Delphine Deloget évite soigneusement de tomber dans le pathos forcé en introduisant quelques personnages secondaires originaux et attachants.

Sylvie peut compter sur le soutien (parfois maladroit) de ses amis mais aussi de ses deux frères : Hervé, le tendre marginal qui a conservé ses habitudes de fêtard (Arieh Worthalter) et Alain, l’ancien joueur de casino repenti (Mathieu Demy). Parmi toute cette petite bande, on note aussi la superbe interprétation de Félix Lefebvre (métamorphosé), en adolescent aîné de la famille qui cherche sa propre voie tout en redoutant de laisser sa mère seule.

Rien à perdre… d’une erreur judiciaire

Rien à perdre Virginie Efira
Virgine Efira, on ne s’en lasse pas…

Rien à perdre est l’histoire d’une erreur judiciaire. Mais loin des discours manichéens, Delphine Deloget brouille les pistes et complexifie une situation à la fois banale et terrible. D’un côté, il y a Sylvie, mère aimante et dévouée qui dépose le petit à l’école, encourage son aîné pour son audition de trompette. De l’autre, il y a les services sociaux presque inquisiteurs, mais qui ne peuvent se permettre de passer à côté d’un « possible » mauvais traitement de l’enfant.

Face à cette situation ambiguë le spectateur se retrouve constamment partagé entre des sentiments d’empathie et d’injustice, tout en émettant quelques doutes sur les réelles capacités de cette maman débordée au mode de vie excentrique. Rien à perdre met en lumière une réalité où l’injustice peut exister sans qu’un coupable évident soit identifié, même lorsque chaque partie agit de manière responsable… Dans ce registre social, Delphine Deloget réussit en tous cas à imposer un ton très personnel qui n’est pas du tout un copier/coller de l’univers de Loach ou des Dardenne. A saluer.

Rien à perdre de Delphine Deloget (Fr, 1h52) avec Virginie Efira, Félix Lefebvre, Arieh Worthalter… Sortie le 22 novembre.