Vous êtes curieux de savoir à quoi ressemble le cinéma bulgare? Eh bien il est à peu près aussi âpre, sec et inconfortable que son voisin le cinéma roumain, avec là aussi, de vraies qualités esthétiques. Prenez Sister, le second long métrage de la Bulgare Svetla Tsotsorkova. Ça commence comme la mauvaise blague d’une enfant espiègle avant de virer aux mélo familial sur fond de misère sociale, sans pleurs ni violon.

Le film est porté par le visage tranchant comme une lame de couteau et les yeux bleus aciers de Rayna, la cadette franchement flippante. Chaque jour, devant le stand de poterie qu’elle tient avec sa mère et sa soeur, l’ado s’invente une tragédie familiale pour apitoyer les clients, racontant à chaque fois des mytho de plus en plus gros.

Sister, film bulgare de Svetla Tsotsorkova

Comme souvent, le mensonge est là pour combler un vide. Enfermées sur elles-mêmes, comme enlisées dans la boue qu’elles travaillent, les trois femmes n’arrivent à communiquer que de façon brutale. Seule la rumeur incessante de la route qui borde la maison fait office de point de fuite. Alors pour briser la monotonie du quotidien, Rayna ne peut s’empêcher de mentir. Jusqu’au jour où elle va trop loin et blesse sa soeur.

Antipathique

Pour réparer le mal qu’elle a fait, elle va devoir se rapprocher de Miro « le croque-mort », l’amant de sa soeur. Tout le film tient sur ce drôle de duo antipathique, entre la brute mal dégrossie et la jeune fille qui incarne aussi bien la pureté que la monstruosité, comme le suggère la sympathique chanson obscène que lui chante les hommes (« Rayna, Rayna, vagin maudit… »). Peu à peu, l’humanité des personnages se découvre, jusqu’à la scène finale en forme de réparation familiale, avec un dernier plan qui suggère subtilement l’amour profond que se portent ces femmes. La curiosité de la semaine si vous avez envie d’échapper aux comédies françaises lourdingues.

Sister, de Svetla Tsotsorkova (film bulgare, 1h37). Avec Monika Naydenova, Svetlana Yancheva, Elena Zamyarkova…