Gérard Paris-Clavel est un magnifique lanceur de pavés graphiques, dont l’œuvre politique, à bâbord de la gauche, a des conséquences parfois inattendues. Son exposition/manifestation portée par le Musée de l’imprimerie a eu des répercussions au Mexique. Le président Obrador a, en effet,  illustré une récente allocution par une des affiches exposée dans Lyon (un petit débordement hors-les-murs devenu viral sur les réseaux sociaux hispanophones), pour défendre son idée du service public : « Quand tout sera privé, nous serons privés de tout. Vive la fonction publique ! ». Ce slogan, Gérard Paris-Clavel, ne l’a pas inventé, il l’a repéré dans une manifestation, puis transformé en œuvre graphique, percutante, en blanc, rouge et noir. Elle a ensuite été reprise sous cette forme, par des militants, lors d’autres manif’. Son travail agit dans les deux sens, comme une marée inlassable, depuis les années 70 et le mouvement artistique de ses compagnons de Grapus, juste après le tsunami de 68. Ainsi, cette affiche réalisée pour la Journée internationale des femmes à Ivry… Signée au crayon bleu « mon corps, mon choix », elle représente un clitoris stylisé. Mais, il n’est point besoin d’être un grand sémiologue de l’image pour reconnaître, aussi, sous ce rapide et élégant coup de pinceau proche de l’idéogramme, le bonnet phrygien de la République.

Sous les pavés, la plage

Cette image, au double sens évident, a été reprise par les mouvements féministes. La réalisation de cette rétrospective exceptionnelle a été rendue possible grâce à de nombreuses réunions autour d’un café avec les équipes du musée, d’un apprivoisement avec l’artiste qui ne signe pas ses œuvres, n’aime pas se montrer, revendiquant avant tout d’être un artisan inscrit dans une démarche collective. D’où le titre de l’exposition : « Avec ». Malgré cette volonté de se cacher derrière l’affiche, son talent éclate sur une sélection de près de 150 œuvres foisonnantes, où s’entremêlent différentes techniques, goût pour le jeu de mot complice (« en chantier de vous connaître », « rêve générale », « coin de vue »), soutenu par un vocabulaire graphique en évolution (un même dessin peut être recyclé sous formes différentes suivant le sujet). Mais sous les pavés, il y a toujours la plage. Gérard Paris-Clavel ne se réfugie pas dans une radicalité déprimée. Au contraire,  il prône un nouvel imaginaire, une utopie joyeuse : « soyons responsables, amusons-nous« .

Avec Gérard Paris-Clavel. Jusqu’au 27 février 2022 au Musée de l’imprimerie et de la communication graphique. Lyon 1er. Du mercredi au dimanche de 10h30 à 18h. 8 €.