La mise en scène commence toujours à l’intérieur des mots avec Ivan Viripaev, auteur russe passionnant qu’on avait découvert avec Illusions, spectacle merveilleux créé par la même équipe artistique que cet OVNI, avant tout drôle d’objet théâtral, même s’il y sera question des extra-terrestres… Enfin presque, parce que dès le début du spectacle, un homme – le metteur en scène, le vrai – vient nous lire en préambule le texte que l’auteur a écrit en forme d’échappatoire : cet OVNI proviendrait donc d’un projet cinématographique avorté, dans lequel des témoins d’apparitions extraterrestres du monde entier devaient raconter leur expérience du troisième type… si seulement un producteur en avait voulu. Un mécène a bien participé au projet – on vous laisse le découvrir, incarné par l’épatant Arthur Fourcade dans la pièce (photo) – même si l’auteur a donc dû se rabattre sur le théâtre, dit-il, faute de mieux, l’essentiel n’étant pas de croire aux extra-terrestres… mais d’entendre l’intimité d’un être humain qui résonne devant d’autres êtres humains. C’est ce qui s’appelle effectivement le théâtre, et c’est loin de n’être rien.

Malice mélancolique

Il y a une forme de malice mélancolique chez Viripaev, une façon de jouer avec l’illusion théâtrale et les vraies-fausses hésitations de ces témoignages incarnés par une demi-douzaine de comédiens, pour mieux se faire surprendre par les émotions. La marginalité, le sentiment de ne jamais être comme tout le monde – d’être pris pour un fou – de Detroit à l’Australie, ou même de se sentir seule à l’intérieur de sa propre famille, Clémentine Allain, déjà radieuse dans Illusions, incarnant un monologue splendide sur cette envie de retourner dans sa “maison”, pas celle de ses enfants ni de son mari, mais celle qui n’est pas de ce monde. On est tous de passage, et le théâtre de Viripaev est bien fait pour rester, et cueillir à chaque représentation cette fragilité inhérente à la condition humaine, même s’il abuse ici parfois un peu trop de sa mécanique d’écriture et des fausses pistes programmées. Mais le miracle a bien lieu – l’apparition du théâtre en l’occurrence – grâce à des comédiens toujours habités par ce travail d’accoucheur dont est capable Olivier Maurin, dans une scénographie toute simple aux lumières soignées. Une illusion si juste qu’elle défie tous les principes de la réalité.

OVNI d’Ivan Viripaev. Mise en scène Olivier Maurin avec sa compagnie Ostinato. Jusqu’au 15 octobre à 19h30 au théâtre de l’Elysée, Lyon 7e Guillotière. Tarif libre de 10 à 14 €. Annoncé complet, places sur liste d’attente
Reprise d’Illusions d’Ivan Viripaev, avec la même équipe artistique. Lundi 12 octobre à 20h30 au Toboggan à Décines. De 20 à 22 €. Réservez vos places

Clémentine Allain dans Ovni d’Ivan Viripaev (photo Julie Allard-Schaeffer)