Le problème avec les lieux éphémères, c’est que par définition, ils ne durent pas. Rien n’est plus à la mode que la réhabilitation de friches, et l’investissement par des bobos dit cultivés des lieux ouvriers. Le résultat est souvent beau du point de vue architectural, enthousiasmant du point de vue de la prog’ (Nuits Sonores, dernière Biennale de la danse…) comme aux usines Fagor Brandt à Lyon 7e, victimes d’un imbroglio récemment dont les politiques (de tous bords) ont le secret, entre Ville et Métropole. Restera, restera pas un lieu culturel. Après avoir failli devenir un dépôt TCL, finalement le lieu restera culturel jusqu’en novembre 2023. Certes… Tant mieux pour les événements – culturels, donc – qui pourront se dérouler d’ici là, mais voilà qui ne change rien sur le fond.

L’usine a bon fond

En fait, la friche a un statut par définition bâtard qui par définition permet à chacun de faire mine de faire des choses sans pourtant jamais les pérenniser. Un peu comme nous quand on prend des bonnes résolutions à la rentrée. En fait, elle permet souvent à des investisseurs privés de trouver des autorisations publiques et à l’investissement public… de se reposer sur les initiatives privées, tout en faisant mine de les organiser. Alors qu’il n’en est rien. Un marché de dupe qui s’appelle souvent “partenariat”, par exemple entre médias et collectivités, et qui se conclut la plupart du temps par ce qu’il risque d’arriver aux usines Fagor-Brandt même fin 2023 : un retour au marché. Ce serait bien que la culture aussi soit affaire de développement durable et pas de simple monnaie d’échange au gré des besoins économiques du moment des structures publiques, comme les friches l’ont toujours été, sous tous les mandats, quelles que soient leurs couleurs. La politique est affaire d’engagement, dans le temps. Pas d’une quinzaine pour divertir les bobos des villes dans des lieux si grands quand ils sont vidés des gens qu’ils ne côtoient jamais. A quand la création d’un véritable lieu culturel – quel qu’il soit ? Depuis l’abandon de la réhabilitation du musée Guimet (dont on ne sait toujours pas ce qu’il va devenir), espérons que le nouveau projet des Ateliers de la Maison de la danse dans le 8e soit de ceux-là : établi et financé en conséquence, pour longtemps.

Photo : Brice Robert.