La Fête des Lumières et l’in­tox du 8 décembre

Vous pensez encore que la Fête du 8 décembre serait due au jour où la vierge Marie proté­gea la ville de Lyon de la peste ? Autant croire en Dieu, ou en tout cas au Père Noël. La Fête des lumières n’est pas plus liée à Marie qu’à la peste, en tout cas à l’ori­gine. Si le 8 décembre est bien le jour de la concep­tion de la Vierge, imma­cu­lée of course, il n’a rien à voir avec un quel­conque événe­ment lyon­nais qui se serait produit ce jour-là. Il est né tota­le­ment par acci­dent, à la suite d’un imbro­glio et des inon­da­tions qui frap­pèrent Lyon en 1852, mais le 8… septembre !

L’autre 8 : la vérité sur le 8 septembre 1852

Le 8 septembre, lui, a toujours été une date clé de la foi à Lyon, corres­pon­dant au jour où les éche­vins, en 1643, firent vœu pour placer la ville sous la protec­tion de la Vierge à la suite d’une épidé­mie de… scor­but ! Rien à voir avec la peste, donc, sauf à prendre des morpions pour de la lèpre ! Et rien à voir avec le 8 décembre.

Seule­ment voilà, au moment d’éri­ger une statue à la Vierge dans la chapelle de Four­vière le 8 septembre 1852 en mémoire des éche­vins, une météo orageuse et le débor­de­ment du Rhône et de la Saône l’en empêchent. L’ate­lier des sculp­teurs à Perrache finit tota­le­ment inondé, compro­met­tant la fin des travaux. On est obligé de trou­ver une date de report. Ce sera (enfin !) le 8 décembre, jour de concep­tion de Marie. Ce sont donc les intem­pé­ries, et non pas la peste, qui ont décidé du 8 décem­bre…

Le mystère de la Vierge et de la peste à Lyon n’est pas celui que vous croyez…

Les illu­mi­na­tions, autre acci­dent de l’his­toire

Tout est donc prêt pour enfin célé­brer la Vierge sur la colline de Four­vière le 8 décembre 1852. Mais un violent orage s’abat à nouveau sur la ville. Les feux de Bengale et autres festi­vi­tés sont remi­sés dans les placards de Monsieur le Curé. Lorsque le ciel se dégage enfin, les Lyon­nais spon­ta­né­ment illu­minent leur fenêtre pour fêter l’évé­ne­ment malgré tout et se substi­tuer aux feux de Bengale initia­le­ment prévus. Les illu­mi­na­tions sont nées, mais elles ne doivent (elles non plus) rien à la peste !

Il faudra attendre plus d’un siècle plus tard et Michel Noir, en 1989, pour qu’elle devienne la mani­fes­ta­tion grand public emblé­ma­tique de la ville. Depuis 1998, elle se déroule désor­mais sur plusieurs jours accueillant entre 3 et 4 millions de visi­teurs, ne se conten­tant plus seule­ment d’un spec­tacle son et lumière, mais deve­nant la seule mani­fes­ta­tion pérenne à conju­guer créa­tion contem­po­raine et patri­moine urbain. Une gageure.

Rava­ler les façades du patri­moine avec la créa­tion

C’est désor­mais une tradi­tion de la Fête des Lumières : détour­ner le patri­moine en méta­mor­pho­sant les façades des prin­ci­paux monu­ments de la ville. A ce jeu-là, les Anooki de l’as­so­cia­tion lyon­nais Inook avait marqué les esprits en 2012 gare Saint-Paul avec une sorte de Pacman nippon. Ils faisaient surgir des petits person­nages d’une fenêtre pour dispa­raître dans une autre, grim­pant sur une colonne pour plon­ger sur le balcon, dans un ordre aléa­toire qui renou­ve­lait le spec­tacle presque à l’in­fini. Devant le succès, les Anooki feront leur retour deux ans plus tard sur la façade de l’Opéra de Lyon. Un cas d’école. Reste à savoir qui cette année leur arri­vera à la cheville… Réponse dans quelques semaines.