Tenu par Muriel Ferrari, le Café des Artisans est une institution à Lyon… anti-institutionnelle ! Ce bouchon authentique se confond avec l’histoire exceptionnelle de sa patronne, véritable mère lyonnaise dans la grande tradition.

L’histoire des débats relatifs à l’authenticité des divers bouchons lyonnais, alimentés de labels, d’associations de défense, de diplômes et de guerres picrocholines, pourrait remplir plusieurs chapitres de l’histoire de Lyon des Romains à nos jours. Pas besoin de certificats pour affirmer que le Café des Artisans est plus authentique qu’authentique. Le café, à l’écart des parcours touristiques et du Lyon historique, est une lumière dans un quartier pauvre en commerces et objectivement moche. Muriel Ferrari, prévient d’emblée : «  il n’y a pas de menu, pas d’ardoise, pas de carte ».

Le Café des Artisans, plus authentique qu’authentique

On mange ce que l’on vous sert et on vous regarde en coin si vous ne terminez pas votre assiette. C’est ce qu’on appelle la méthode mère lyonnaise historique, dont Muriel est un des derniers spécimen. Donc, voilà l’entrée, servie par la taulière, qui arrive à être partout à la fois, au bar, en cuisine et au service : une quiche lorraine comme on ne voit plus, de la taille d’une part de gâteau allemand. Sa quiche Lorraine est un Annapurna de la cuisine ménagère. Comme disait Paul Bocuse, c’est souvent plus compliqué de faire simple. Et au niveau de la cuisine de l’essentiel, la cuisinière est au sommet du savoir-faire.

Muriel Ferrari vous attend à sa table. (photos Susie Waroude / Exit Mag)

Deux plats au lieu d’un

Rien qu’en assaisonnement de salade, elle met la pâtée à nombre de ses confrères. Les sauces sont vives, à la lyonnaise, comme des chevaux cabrés (il fallait bien finir par aborder ce joli nom de Ferrari). Comme à notre table, certains hésitaient trop longtemps entre les endives au jambon et le sabodet au beaujolais, elle a rapidement réglé le problème : « je vous sers les deux dans les plats, ensuite vous vous débrouillerez ». Inutile de dire qu’après les endives au jambon, dont nous sommes resservis plusieurs fois, il n’ y avait plus vraiment de place vacante pour un organisme de bobo urbain qui ne travaille pas sur les chantiers.

Museau, blanquette et sabodet au Beaujolais

Seulement, le sabodet était là confit des heures dans la réduction d’un tonneau de beaujolais et de fond de veau. On est retourné au turbin. Superbe : capable de transformer de ces gens qui ne sont pas d’ici en purs Lyonnais. Lors d’une session suivante, un début d’habitude, préalable à un futur rituel, on a fondu sur la salade de museau et une blanquette un peu liquide, mais de compétition. On ne s’appesantira pas sur le passé tumultueux de la patronne. Elle a écrit plusieurs livres à ce sujet, dont un préfacé par Momon Vidal (pour donner une piste). Elle vous en parlera mieux en s’asseyant à votre table au moment du calva. Vous apprendrez aussi comment elle est devenue une star au Japon.

Le Café des Artisans, chez Muriel. 16 bis rue du Dauphiné, Lyon 3e. 04 78 53 20 12. Fermé le dimanche soir. Menu : 18 euros. Il est possible de commander des plats à l’avance, genre grenouilles quand c’est la saison.