Le Substrat, restaurant bistronomique du « plateau » s’était fait greffer un bras sur le trottoir d’en face : So 6, la saucissonnerie. On y pratiquait l’art de la saucisse en tous genres. Aujourd’hui le patron Hubert Vergoin a zigouillé la saucisse pour inaugurer à la place la Cabane du Substrat -même si subsiste la pratique régulière de battles de saucisses impliquant des restaurateurs et vignerons au tempérament de bretteurs. Cette nouvelle Cabane est en réalité la version diurne du Substrat, car elle dispose elle, d’une terrasse. Comme cette rue est un espace relativement « apaisé » comme on dit à la mairie, c’est « tranquchille » comme on dit à Marseille. Voilà comment ça marche…

Le comptoir et les Côtes du Rhône. (photos Nicolas Villon).

La promenade du canard

Notre cuisse de canard, par exemple, a été confite dans les cuisines du substrat, plongée dans un bouillon aux champignons toute une nuit. Puis dans la matinée, elle a traversé la rue. Et comme tout le monde le sait, quand on traverse la rue il ne peut que vous arriver que de bonnes choses, si vous n’êtes pas écrasé au milieu. A la Cabane, l’équipe assemble et réchauffe. L’assemblage, terme trop souvent dévalorisant, qui désignait naguère et exclusivement, la juxtaposition bécasse de produits industriels. Ici, c’est l’inverse, l’« assemblage » est un style culinaire assumé, l’art de mettre en liens empathiques différentes pièces d’un jeu rigolo qu’on appelle la cuisine. Et Hubert Vergoin sait y faire comme on dit à Lyon. A côté du canard en promenade en forêt sur une petite musique asiatique : une salade de haricots verts enlacés par des filaments de carotte fermentée, en compagnie d’oignons frits et de sauce cacahuète. C’est très bon. Comme une soupe inspirée de la bouillabaisse. Au fond de l’assiette : un filet de rascasse, des petits légumes (pas trop fins, un peu à la « paysanne »), des herbes, sont baptisés par une soupe de poisson de roche, versée au dernier moment. Pour accompagner : une interprétation de la rouille, mayonnaise gentiment pimentée et aillée, exhalant le paprika fumé. Du coup, la luge accrochée au mur, le chapeau du grand-père et la déco bricolée en bois façon chalet font plutôt rire. La truite en gravlax, piment citron vert sous une râpée de brebis sec (c’est simple, c’est malin, c’est délicieux) se marre encore. Bref, c’est très bien, tant pis pour les saucisses. Et rappelons-nous que Vergoin a un lourd passé de caviste. On a particulièrement apprécié une de ses dernières découvertes : le Côte du Rhône bombasse d’Élodie Jaume. Ce gars est un renard avec le physique d’Astérix.

La Cabane du Substrat, 8 rue Pailleron, Lyon 4e. 04 78 29 14 93. Ouvert du mardi au vendredi à midi (menu déjeuner uniquement). Ouvert les vendredi et samedi soir en version table d’hôtes (sur réservation). Menu complet midi : compter entre 28 et 30 euros. Cuisse de canard : 12 euros. Rascasse : 14 euros. Dessert : 8 euros.