Il y a des titres qui résonnent plus que d’autres, comme celui d’un des grands films de Tavernier, après un an que nous voilà cloîtrés par la pandémie… Dans un de ses derniers entretiens, accordé à Arte il y a à peine quelques semaines pour parler du western qu’il aime, Bertrand Tavernier a eu cette phrase géniale : “J’ai fait des films avec le désir de faire découvrir à des gens que je ne connais pas des choses que j’ignorais”. Passeur invétéré jusqu’au bout…

Alors à l’heure, pour aller vite, ou qui se réjouit de voir telle subvention baisser (500 000 € pour l’Opéra de Lyon en moins en l’occurrence) ou qui fait mine de s’en offusquer sous prétexte qu’on menacerait son rang ou la “haute culture”, on se dit que face à autant de sectarisme de part et d’autre, les coups de gueule et la curiosité du grand “Tatav” (pour les intimes) pour tout ce qui n’est pas lui, nous manquent déjà…

C’est pourtant par les découvertes et les rencontres, fussent-elles improbables, que l’on vit, et rien d’autre. En encourageant tout ce qui n’est pas nous, ce que Bacri, autre grande gueule du cinéma français qui a lui aussi filmé toute sa vie des héros ordinaires, avait appelé “Le Goût des autres”.

Je dois à Bertrand Tavernier entre mille autres choses de m’avoir fait découvrir Edmund T. Gréville, un cinéaste méconnu dont je garde un souvenir ému et émerveillé, je ne sais pas pourquoi, ou un des plus beaux portraits de famille de Sidney Lumet, A bout de course, qu’il défendait passionnément et avant tout le monde dès sa sortie, devenu depuis un de mes films préférés.

Alors plutôt que de se positionner pro- ou anti- ceci ou cela, on préférera toujours découvrir la danse maghrébine qu’on ne connaissait pas quand elle est signée Fouad Moussouf ; les troubles d’un grand acteur comme Mathieu Amalric qui ne sait justement pas trop dans La Collection de Harold Pinter s’il est ceci ou cela… ; les dessins aux couleurs radieuses pour tous du premier artiste transgenre à être exposé dans un musée, Edi Dubien…; ou encore la passion de la culture russe qu’André Markowicz et Jean Bellorini transmettent à Villeurbanne à de jeunes acteurs « absolument formidaaables », comme aurait dit le grand Bertrand.Et comme il en avait l’habitude, on aurait pu dire en sortant : « C’est absolument formidable ! » Vous trouverez donc dans le numéro d’avril « formidaable » et pas comme les autres d’Exit, autant de culture(s) que d’envies de sortir au grand air. En espérant que les lieux culturels réouvrent enfin, dont l’Institut Lumière du grand Bertrand. On l’entend déjà gueuler…

Vous pouvez aussi retrouver notre critique de son film Le Juge et l’assassin, qui vient de débarquer sur Netflix, << ici >>, et celle de son dernier film, Quai d’Orsay, diffusé sur France 2, << >>.