C’est un court-métrage d’une demi-heure, mais qu’est-ce que c’est long, Strange way of life ! En s’adonnant à un western gay alors qu’il avait failli diriger Le Secret de Brokeback Mountain en son temps, on espérait qu’Almodovar se lâche… Surtout dans le format, souvent plus libre, du court-métrage. C’est malheureusement tout le contraire qui se produit ici. Tout paraît emprunté et académique dans cette production Saint-Laurent dont on retrouve un beau blouson vert en ouverture.

Un plan sur les fesses (habillées) de son ancien amant dévorées des yeux par le shérif 25 ans, un dialogue cru sur le « foutre » partagé des deux cowboys… et c’est tout ! Les retrouvailles de ces deux amants cachés 25 ans après n’existent que dans le jeu formidable de Pedro Pascal – homo assumé et aimant – et du shérif Ethan Hawke, torturé par son homosexualité et le dilemme d’appliquer la loi.

Pedro Pascal, amant magnifique…

Strange way of life, un western gay d’Almodovar sans grand intérêt

Si les aficionados pourront toujours y voir une forme d’autoportrait d’Almodovar en mentor homosexuel contrarié de ses amants (hypothèse), les deux grands acteurs n’ont malheureusement ici que deux ou trois scènes à se mettre sous la ceinture (chastement). On est bien loin du superbe autoportrait de Douleur et gloire. Le personnage assez mal joué du fils de l’un devenu l’ennemi de l’autre nous éloigne de la belle relation des amants, sans rien produire d’autre que des dialogues de sitcom et un flashback convenu où le vin coule à flots au milieu des filles. Bon…

La musique empesée, presque opératique, d’Alberto Iglesias éloigne le western et toute velléité d’action dans la scène de bagarre, sans pour autant produire la moindre émotion mélodramatique… La durée trop resserrée ne permet manifestement pas au talent de conteur habituel du grand Pedro de s’épanouir. Qu’est-ce qu’Almodovar a bien voulu faire dans ce premier film tourné en anglais, curieux objet surproduit pour un court-métrage ? Strange way of life nous a laissés frustrés et interloqués avec son générique de fin qui tombe comme un cheveu sur la soupe, et dure plus longtemps que chacune des scènes du film…

Ethan Hawke et Pedro Pascal, comme sur un tournage…

Deux courts-métrages ne font pas un film

La Voix Humaine en complément de programme – présenté il y a trois ans au festival Lumière dans la plus grande indifférence – ne vaut pas mieux lui non plus que les longs métrages du maître, malgré Tilda Swinton. Il vaut mieux revoir La Loi du désir dans lequel Almodovar faisait jouer le monologue de Poulenc et Cocteau par Carmen Maura. Sur une splendide version espagnole de Ne me quitte pas chantée par une petite fille sur un travelling. A bientôt Almodovar

A Strange Way of life suivi de La Voix Humaine de Pedro Almodovar, regroupés en une seule séance sous le titre « L’Expérience Almodovar » (Esp-Fr, 1h01) avec Ethan Hawke, Pedro Pascal, Manu Rios, Jose Condessa, Tilda Swinton… Sortie le 16 août.