Il faut souffrir d’un certain cinéma français pour apprécier Chronique d’une liaison passagère, mais le nouveau film d’Emmanuel Mouret a fini par nous toucher au coeur, avec Sandrine Kiberlain et Vincent Macaigne dans leurs plus beaux rôles.

Elle débitait déjà des insanités sexuelles face à Fabrice Luchini dans Tout sur Robert, un de ses premiers rôles. Cette fois, Sandrine Kiberlain passe à la pratique. Quinqua en jeans baskets à la Birkin,  cette Charlotte de Chronique d’une liaison passagère « séduit encore les jeunes« . Et femme toujours plus libérée, elle compte bien « grimper aux arbres » et « cueillir les plus beaux fruits« , « sans se poser de questions ». Malheureusement le film, dans sa première partie, est loin de faire comme elle, et retombe souvent dans les travers du cinéma d’Emmanuel Mouret (onze films au compteur) : poser trop de questions et faire s’en poser en permanence à ses personnages, en plein commentaire d’eux-mêmes dès la première scène… Même l’échappée dans la nature de ce couple de bobos parisiens passant leur temps entre une expo au musée et une séance d’un film de Bergman devient le prétexte d’une énième psychanalyse de couple extra-conjugale. Bref, si Charlotte / Sandrine Kiberlain ne supporte la passion et ses souffrances, il vous faudra supporter les souffrances coutumières d’un certain cinéma français pour arriver à la beauté de ce film… qui n’en manque pas.

Sandrine Kiberlain et Vincent Macaigne dans Chronique d'une liaison passagère d'Emmanuel Mouret.
Vincent Macaigne et Sandrine Kiberlain en train d’enlever leurs chaussures avant leur « plan à trois ».

Le plus beau rôle de Vincent Macaigne

Car Emmanuel Mouret a fait appel à un nouveau scénariste, Pierre Giraud, passé par des séries comme Les Sauvages ou Oussekine. S’en suit un art du feuilleton assez jouissif entre ellipses, rendez-vous incidents et dialogues on ne peut plus lucides. « Il faut être charitable pour coucher avec un homme comme quoi«  lui dira cet homme « lent« , perdu à force d’être déconstruit entre une femme qu’il aime – qui restera hors champ. Il faut voir la tête de chien battu attentionné d’un Vincent Macaigne dans son plus beau rôle pour s’étonner des choses simples avec sa Charlotte. « Je n’ai pas l’habitude », commentera-t-il sobrement. La bascule sentimentale de cette « relation d’intelligence » aura bien lieu, le temps d’un plan à trois délicieux aux conséquences inattendues qu’on vous laissera découvrir… Cette divine idylle contemporaine en totale liberté pourrait presque se voir comme l’exact opposé de la relation de vengeance du très beau Mademoiselle de Joncquières… Jusqu’à une scène finale qui vient vous cueillir le coeur au moment où vous vous y attendez le moins, dans une scène d’adieu qui n’en est pas une, comme un dernier tour… de rein. L’air de rien, cette chronique de l’amour en fuite aura su éviter tous les clichés du genre et construire de nouvelles perspectives comme une Carte du tendre d’aujourd’hui, au plaisir digressif insoupçonné.

Chronique d’une liaison passagère d’Emmanuel Mouret (Fr, 1h40) avec Sandrine Kiberlain, Vincent Macaigne, Georgia Scallett, Maxence Tual… Sortie le 14 septembre.

Sandrine Kiberlain et Vincent Macaigne au musée dans Chronique d'une liaison passagère.