5 ans de politique en 5x 1 heure, telle est l’ambition, démesurée, de Hugues Duchêne : raconter les 5 dernières années de notre drôle de vie commune, avec en point de mire la désillusion politique absolue, mais comme outil principal l’énergie peu commune d’une jeune troupe de théâtre. Du théâtre documentaire archi-documenté (lui aussi vient de Sciences-Po), mais dynamité jusqu’à la jubilation par l’écriture de plateau.

Le contraire d’un tract partisan, avec même une autodérision artiste qu’on a toujours guettée en vain dans les (nombreuses) tribunes de Juliette Binoche. Hugues Duchêne est le contraire d’un cynique, il a soif de comprendre et de partager, et même s’il finit les 5h un peu essoufflé par son fou projet à force de trop lire la presse le matin (comme nous), il pense et il écrit beaucoup plus que Christophe Barbier (qui ne commet pas que des éditos, il fait aussi des pièces de théâtre)

Vanessa Bile-Audouard. (photos Simon Gosselin)

Hugues Duchêne, c’est plus marrant, en chantant

Mais surtout, cette politique du dégagement en chanson est des plus plus drôles et fait souvent mouche. Notamment lorsque Marianna Granci entonne en live le Manque d’amour plus vrai que nature de Juliette Armanet alors qu’on voit défiler les scores vertigineux du RN ville par ville sur une carte de France. De la grande à la petite histoire, l’hommage à Beethoven avec une sonate au Clair de Lune au violon décomposé dont chaque note correspond à un mot de SMS de Benjamin Grivaux à sa femme reste un bijou d’orfèvrerie audiovisuelle, et c’est lorsqu’il fait se répondre archives sonores ou visuelles et musique live que cette fête collective de l’incompréhension est au mieux de sa forme théâtrale.

Mentions spéciales à Vanessa Bile-Audouard en travestie naturelle de Gaspard Gantzer et Théo Comby-Lemaitre (photo), sparing partner idéal à tout faire, aussi drôle que Jean-Rémi Chaize. C’est tout à l’honneur des Célestins d’ouvrir leur grande scène à un marathon théâtral aussi original. On a hâte (au théâtre) de retrouver l’épisode 6 annoncé pour mai 2022.

Je m’en vais, l’Etat demeure. Ecriture, conception et mise en scène Hugues Duchêne. Jusqu’au samedi 29 mai au théâtre des Célestins, Lyon 2e. Intégrale samedi 29 mai à 14h30. De 9 à 33 €. Placement libre. Réserver.