Ce nouveau restaurant des hauteurs de la Croix-Rousse, à la place du défunt Temps perdu, coche presque toutes les bonnes cases du comportement éthique. Semo (qui signifie graine ou semence en espéranto) se fournit directement en herbes et en légumes de saison dans le champ de leur pote Raphaël, producteur qui exploite un champ en permaculture dans les Monts du Lyonnais (sous le nom de semado : semailles en espéranto).

Toujours dans le cadre de cette stratégie d’approvisionnement local, les poissons ne remontent pas le Rhône en passant par Rungis. Ce jour là, il y avait une excellente truite (la tête et la queue dépassaient de l’assiette) élevée en Isère. Les viandes fournies par l’excellent boucher Tête Bech proviennent de bêtes entières. Ce qui permet d’utiliser chaque partie de l’animal sans gâcher (merci de nous réserver des os à moelle).

Les légumes non utilisés sont transformés en conserves ou en pickles grâce à la magie de la lacto fermentation, et même en gels aromatiques comme les trognons et épluchures de pommes. Le vin est issu de vignes situées 150 km maximum autour de Lyon (tant pis pour le champagne). Ne vous mettez cependant pas dans la tête que la fréquentation assidue de ce restaurant compensera votre prochain vol long-courrier (d’ailleurs le terme n’existe pas en espéranto). Et pourtant, il le mérite.

Fanny Duranton, cheffe passée par Anne-Sophie Pic

La cuisine de Fanny Duranton (passée chez Anne-Sophie Pic, aux Mauvaises herbes etc.) va à l’essentiel. Telle la flèche sur la pomme, dirait Guillaume Tell. On sait que le produit est là. Elle l’accompagne avec finesse, sans multiplier les saveurs et les jongleries de texture. Trois goûts dans l’assiette, de la précision dans les cuissons, quelques petites herbes peut usitées comme le mouron des oiseaux (entre le maïs et la noisette) : c’est franchement bon.

Les côtelettes d’agneau du midi notamment, rosées à coeur, accompagnées par une mousseline de pommes de terre, chou-fleur rôti avaient ce goût authentique qui passe directement dans cette partie du cerveau, pas souvent active, consacrée aux tables étoilées. La thématique est rurale, la réalisation urbaine, comme le cappuccino de courge et mousse d’amande piquée de petites noisettes torréfiées et pimentées.

Le fromagédessert – comment appeler autrement l’association sucrée salée de fourme d’Ambert et de poire(s) – ou le riz au lait à la sauge, spécial retour en enfance, tiennent de la même évidence. Ce principe de clarté se retrouve le soir en petits plats. Et dimanche, c’est plat unique, poulet rôti comme chez mémé.

Semo. 2 rue des Fantasques, Lyon 1er. 04 26 17 85 34. Ouvert à midi du vendredi au dimanche. Ouvert le soir du mercredi au dimanche. Le soir : acras de chou-fleur, mayo ail noir (8 euros), truite saumurée aneth et combava, gel d’agrume et et huile d’aneth (11 euros), etc. Verre de Syrah (côtes rhodaniennes de chez Nicolas Bardet) : 5 euros. Photo : Tom Augendre / Exit Mag.