Arlette Hugon incarnait assez bien le concept de « dernière mère lyonnaise« . Fille de marinier, passée à la batellerie sur un océan de beurre et de crème, elle vient de prendre sa retraite à 77 ans. Après la fermeture du Jura, la vente du Musée (avec le même esprit), il ne reste donc presque plus que l’indépassable Garet pour représenter le bouchon de tradition.

Avec son mari Henri, Arlette Hugon avait repris en 1985 un bouchon créé sous Jules Ferry. Nos amis déclinistes y ont vu une manifestation évidente de déchéance générale, d’une extinction de la cuisine lyonnaise comme ont pu connaître les dinosaures. Il n’en est évidemment rien. Le folklore a la peau aussi dure que le vieux fourneau occupant un coin de la cuisine, où mijote une marmite de la taille d’une bombe à fragmentation.

Les « Vilaines » du nouveau Chez Hugon

Les nouvelles occupantes du bouchon Chez Hugon, autoproclamées « Les Vilaines » en signature rigolote d’ardoise, n’ont pour l’instant rien changé à la déco du plus petit bouchon de Lyon. Il y a encore les traces argentiques du passage de Jean-Michel Jarre et Charlotte Rampling ou du plus attendu Laurent Gerra, écumeur local d’andouillettes et de canons. La plaque Guignol est toujours là, comme la pub pour le Cep Vermeil dont l’emblème est Gnafron, l’alcoolo d’avant les écolos. On reste fidèle au bouchon.

Hareng pomme à l’huile, museau et quenelle de brochet

Paola, au service, est idéale dans le rôle de néo-matrone, un petit ruban à carreau rouge et blanc pour retenir les cheveux, raccord avec les nappes. Elle vous interpelle de façon non genrée : « tiens, voilà du pain, ma biche » ! Fatima, woman power en cuisine, a hérité de toutes les recettes et petits trucs de Chez Hugon, sans visiblement avoir besoin de conduite accompagnée, vu que c’est bon.

Le hareng et pomme à l’huile est assaisonné avec un peu de poignet, le poulet au vinaigre plutôt cuit-cuit a de l’âme dans la sauce. Fatima a ajouté quelques nouveautés à la liste des classiques du bouchon (salade de lentilles au lard, pieds de veau, museau, quenelle de brochet, tête de veau, gâteau de foie, etc.). Sa terrine de foie de volaille et lapin a de l’esprit et du caractère.

Arlette Hugon, en son ancien royaume. (photo Véronique Lopes)

La plus grande andouillette du plus petit bouchon de Lyon

Elle a aussi – bonne idée – introduit un saucisson brioché de compétition. Tiens, voilà justement Arlette Hugon, de passage, en version cliente. Elle entame une conversation sur la plus grande andouillette du monde réalisée par Bobosse : 16, 80 mètres de long ! Un client entre en disant : « ben, il n’y a que des vieux ici »….

Pas faux, mais pas définitif. Chez Hugon, l’attrait de la très bonne tarte aux pralines ou du tablier de sapeur, souple à l’intérieur finement pané à l’extérieur dans du beurre mousseux, est tellement intemporel qu’il survole les générations. A noter : la carte des vins fait enfin un saut dans le qualitatif, avec notamment avec le joli Rasteau d’Elodie Balme.

Chez Hugon. 12 rue Pizay, Lyon 1er. 04 78 28 10 94. Ouvert midi et soir. Fermé samedi et dimanche. Menu : 32 €.

Arlette Hugon en famille.

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